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Living In A Shadow
A Vacant Valley Compilation – CD
Vacant Valley 2015

Le label australien Vacant Valley fête ses cinq ans. Cinq ans à publier des disques que personne n'a jamais mis en tête de gondole, cinq ans à farfouiller dans les méandres de l'underground pour tenter d'amener à la lumière avec les moyens du bord des groupes qui ne font rien pour l'aider. La musique et rien que l'amour de la musique. Living In A Shadow, un art de vivre et le moyen idéal pour se plonger dans tous ces groupes inconnus ou presque, faire le tour du propriétaire en 23 groupes pour autant de morceaux avec que des formations locales ou néo-zélandaises. Et vous en prenez pour pratiquement 80 minutes. Cela a de quoi faire peur. Vous auriez tort.
Cette compilation réussit le tour de force de ne présenter aucune dangereuse faiblesse, aucunes pistes que vous voulez à tout pris zapper. Certes, tous les morceaux n'atteignent pas des sommets, loin de là, mais chaque compo, dans des styles très variés, à quelque chose à offrir, son charme particulier qui éveille la curiosité, son originalité, son piquant donnant envie de se balader dans cette flore sauvage et exotique. Même le temps d'un Orlando Furious pour un hip-hop noise de l'impossible ou Gerald Keaney & The Gerald Keaneys dans un grand numéro de crooner désaxé sur fond de musique qui ne ressemble à rien et sa mélodie miraculeuse, des groupes qui ne tiendraient pas sur la durée d'un album mais qui l'espace d'un titre glisse en toute tranquillité dans votre conscience ouverte à toutes les improbabilités comme Shiny Coin venant tout droit de la brumeuse Angleterre et la compile C86 ou l'atmosphère onirique et enfumée de School Girl Report.
Parfois, ce sont les noms de groupes qui font peur, comme Whitney Houston's Crypt alors que c'est une sorte de Divorce des Antipodes très alléchante ou Bridal Gnome, le groupe du patron, pour un duo noise barré et décalé, deux qualificatifs semblant une constante pour tous ces groupes. Hex On The Beach sent également le jeu de mot foireux mais n'allez pas le dire en face des deux minettes composant ce groupe, elles ont l'air maléfique et le vice noise dans la peau avec des chants de goules.
Et même les groupes qui se sont pris un vent lors de leurs précédents disques s'en sortent avec les honneurs, que ce soient King Tears Mortuary, Bi-Hour dans un Frankie (Are You There?) qui n'est pas une reprise du Frankie Teardrop de Suicide mais un joyeux et foutraque détournement que ça ne m'étonnerait pas ou Go Genre Everything, des groupes qui se foutent tellement de tout, de ce qui se fait ou ne se fait pas que parfois, la chance peut tomber du bon coté de la pièce. Il semble que cette compilation soit particulièrement vernie.
Parmi les valeurs sures et les groupes connus par ces pages, citons les deux groupes défunts que sont Psy Ants pour une version live de This Could Be Hell, morceau figurant sur leur unique album et les grandioses Useless Children avec Rod, vieux morceau sorti sur un CD à 100 exemplaires et que seuls leurs potes avaient eu la chance d'écouter. Autres groupes connus, Per Purpose avec l'inédit toujours aussi fiévreux Reaction et Girls Pissing On Girls Pissing avec Scissoring, morceau tiré d'une cassette et invariablement troublant et envoûtant. Cured Pink, responsable d'un single qui avait marqué les esprits en 2013 et dont le premier album va sortir en août, se fend également d'un morceau étrange. Ce groupe possède indéniablement un truc.
On ne va pas passer en revue tous les groupes, je sens que vous vous lassez déjà (pour les plus courageux qui sont arrivés jusqu'ici) mais des bonnes surprises et des groupes dont on va suivre attentivement les futures sorties, il en existe encore, à commencer par Treehouse, un groupe de Tasmanie et de la fameuse scène d'Hobart qui a déjà révélé les fabuleux The Stickmen ou Native Cats. Treehouse a déjà un album à son actif (Interzone) mais les nouvelles compositions plus mélancoliques semblent calibrées pour marquer durablement les esprits.
Pour le reste, c'est à votre bon cœur. En plus, ce n'est que de l'inédit, des morceaux rares éparpillés sur des disques dont personne ne soupçonnait l'existence ou des versions live. Le catalogue de Vacant Valley recèle des trésors. Ça serait bien le diable si vous ne trouviez pas votre pépite.

SKX (07/07/2015)