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A Butcher's Waltz
4 Way Split - LP
Learning Curve 2012

La valse du boucher semble être un titre tout à fait approprié. Quatre groupes, quatre bras armés prêts à trancher dans le vif d'un noise-rock se dévorant à toutes les sauces. Un rock décapité et laissant place à des flots de bruits iconoclastes, des structures non répertoriées et martyrisées dans leur fondement mais avec de la rigolade et un sens de la valse boiteuse.
Skoal Kodiak a eu une actualité récente avec Kryptonym Bodliak, deuxième album sur Load records. Le trio cintré de Minneapolis propose deux morceaux, inédits, comme tous les morceaux de cette compilation. Deux joyeuseries aussi dansantes qu'un chien aveugle courant après sa queue, un 99999 perversement tribale, techno-noise d'arriérés, chanteur psalmodiant et crachant, transe déglinguée se poursuivant sur Ruined Rings mais sans la voix. Effet moins convaincant. Ce qui est bien avec Skoal Kodiak, c'est qu'on peut s'attendre à tout et à n'importe quoi et c'est exactement le résultat obtenu sur ces deux titres qui en ont strictement rien à foutre de ce qui doit se faire ou non dans les milieux autorisés.
Seawhores partage exactement la même philosophie de Skoal Kodiak. Collectif de Minneapolis tournant autour de la doublette Cody Weigel et Adam Marx, avec cette fois-ci Charles Gehr en troisième larron. Larron qui a parfois eu la chance de porter le nom de Brian Chippendale (Lightning Bolt), Jeff Mooridian (Vaz, Hammerhead), Freddy Votel (Skoal Kodiak, Cows) ou le dinosaure Dale Crover. En deux albums, Seawhores s'est permis une liberté totale. C'est encore le cas avec ces trois titres. Noise-rock frappée, instrumentale, lourde, qui fait mal rythmiquement avec synthé quasi-mystique sur Our Embassy. The Architect empiète sur les plates-bandes de Skoal Kodiak, le stress en plus et le fun en moins. Laborieux. Et The Cleaning Lady est une charge punk-noise en bonne et due forme, mêlant Hammerhead et les Melvins sur l'autel de la peur mais avec un je ne sais quoi de frelaté empêchant les relations humaines de se nouer.
Gay Witch Abortion est un duo originaire des Twin Cities (Minneapolis + St Paul) et a déjà sorti deux disques sur Learning Curve. Ne faites pas l'erreur de commencer par ces six morceaux pour les découvrir. Le titre général est Oblation mais chaque morceau possède son propre sous-titre, comme un accouchement douloureux découpé en six scénettes, sans queue ni tête, avec des pets bruyants, une basse agricole, des perturbations sonores qui ne perturberont que le premier communiant, des déflagrations tuées dans l'œuf, tout comme les bouts de mélodies ou tout ce qui pourrait ressembler à un début d'ébauche de commencement d'un quelconque espoir. Ca se soigne mais c'est quand même anecdotique. Préférez largement leur précédent 10'' avec H.O.F., soit Halo Of Flies, soit Tom Hazelmeyer, boss visionnaire de Amrep, pour un trio lubrique qui va mériter prochainement sa chronique.
On garde le meilleur pour la fin. Power Take Off, nouveau trio avec Gus Engstrom, ancien bassiste des ex-Grids qui ont eu la très mauvaise idée de se séparer après avoir laissé à la postérité un Kansas dévastateur et dévasté. Un seul morceau mais belle bête. Plow Share est son petit nom. Dix minutes de vulcanologie et d'intense bouillonnement, répétitives, lancinantes et jamais ennuyantes. Un son dantesque, épais. Voix autoritaire de prédicateur fou traversée de samples, à moins que ce soit un sample depuis le début. Basse bourdonnante. C'est le dernier coup de machette, celui qui achève, le boucher le plus sanguinaire mais celui qu'on préfère avant que des gazouillis d'oiseaux ne viennent calmer tout le monde. On prend note pour la suite.
Learning Curve records est un label de Minneapolis, vous l'aurez compris, n'a pas l'étoffe de l'imposant Amphetamine Reptile qui a fait la réputation de cette charmante bourgade. Le catalogue n'est pas aussi attractif. Il n'en reste pas moins régulièrement actif. A Butcher's Waltz ne fera pas leur renommée ni leur fortune mais c'est un bel instantané d'une scène noise-rock vivace et sachant sortir des sentiers battus.

SKX (09/03/2012)