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Burning Axis
s/t – LP
Hominid Sounds records 2019

Sur le papier, c’est très alléchant. Les deux premiers membres historiques de Noxagt aux cotés de Kjetil Brandsdal, à savoir le violoniste Nils Erga et le batteur Jan Christian Lauritzen qui passe à la guitare et qui joue aussi pour No Balls. Pour la batterie, Thore Warland déjà vu chez Staer et Golden Oriole. Une belle brochette de tordus. Figurant sur des disques qui comptent. Enfin, surtout si vous aimez votre rock matraqué avec vigueur, la noise granitique lourdement charpentée et les structures sismiques.
Sur disque, par contre, c’est une autre histoire. Une histoire très rude, extrêmement rude et compliquée. Burning Axis ne représente pas la somme de leurs groupes précédents ou actuels. C’est un véritable cauchemar. Le genre de cauchemar où vous devez absolument faire quelque chose mais vous restez indéfiniment bloquer sur un geste, vous le répétez sans cesse, vous êtes d’une lenteur aberrante, avec le stress, la panique grandissante vous empêchant encore plus d’accomplir votre action. Voilà à quoi ressemble la musique du trio.
Et la principale cruauté de Burning Axis, ce n’est pas ce sentiment de répétition démesurée ou que les cinq titres ne semblent former qu’une très longue masse unique et informe mais le fait que ça ne démarre jamais. Que tout est joué à la même vitesse, sur une tonalité identique. Vous vous dites qu’à un moment donné, ça va partir, exploser, s’effondrer ou même se fissurer. On ne demande pas grand-chose, on veut juste que quelque chose se passe mais non, rien. Et ça, c’est insupportable. Nerveusement pas concevable. Et les micro variations ou micro montées d’adrénaline ne comptent pas. Burning Axis ferait passer Orchestra Of Constant Distress pour un groupe de reprises des Beach Boys.
Le violon traîne son archet sur des cordes comme des couteaux rouillés, entre crissements affilés et complaintes agonisantes. Les harmoniques sont de l’acide s’immisçant dans les méandres engendrés par la guitare et la batterie, tels des fantômes ne croyant pas à leur propre existence. La batterie marque un faux rythme dans un no man's land spectral, roule des battements lugubres quand ce n’est pas une disparition totale des écrans radars. La guitare erre, semble amorcer une convulsion, un cri puis reste sur place, hagarde, désorientée. Les accords courbent l’échine, se désagrègent dans un vide insondable. L’intensité est réprimée. La fatigue s’empare de chaque sillon.
Sur un court moment, l’hypnose peut fonctionner, l’angoisse peut accrocher, les dissonances corrompre l’esprit, le chambouler dans l’espoir maladif qu’une vague de tension va se soulever comme sur les douze minutes de Descending Black Angel. Sur le long terme, c’est un appel à la déprime, au meurtre par dépit ou à se mettre une corde au cou par abandon.
Reste cette pochette éminemment troublante, cette femme portant un enfant apaisé, ce visage très beau, ce regard qui lui captive vraiment et semble vouloir crier quelque chose. A vrai dire, je savais à quoi m’attendre en me procurant ce disque. Et je crois que je l’ai fait uniquement pour la pochette.

SKX (17/10/2019)