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Harpon
Béji – LP
Rejuvenation/Kaos Kontrol/Poutrage/Tandori/Whosbrain 2017

Harpon est une arme, Harpon se jette, Harpon plante ses crochets et quand la proie est atteinte, il est inutile d'essayer de s'en débarrasser. Harpon est plus fort que toi. Harpon est à jamais en toi. Béji est le premier album du trio de Reims après un split single avec Baxter Stockman et les ravages sont irrémédiables. Harpon est de la trempe des Pord et autres entités noise-rock et hardcore comme Unsane évoluant comme si leur vie en dépendait. C'est d'un bloc qu'ils se lancent dans le gouffre avec l'assurance que le lendemain n'existera pas.
Intensité est le maître mot. Harpon joue des morceaux assez simples, répétitifs, appuyés, foutrement appuyés, ça te rentre dans la chair et ça met une pression de malade tout en élaborant des ambiances noires, profondes et torturées. Les trois premiers titres sont ainsi coulés dans un béton identique, s’enchaînent quasiment sans respiration, ça se prend pleine tête sans sourciller, sans bouger d'un poil, pétrifié par autant de colère, un matraquage en règle, toujours à en remettre une couche dans la féroce intensité en un minimum de temps. Ça t'arrache un cri. Avec le quatrième morceau Vile Colonne, Harpon ralentit la cadence mais pas la tension. Morceau pour l'échafaud, lourdeur pénétrante, les têtes continuent de tomber.
Et ça repart de plus belle sur la face B avec Harpon, le titre, et cette voix beuglante qui pourrait manquer de relief et de variété sur l'ensemble mais collant tellement bien à l'univers poisseux et sauvage de Béji. C'est de l'obstiné dont le compromis ne fait pas partie du langage. Ce qui est surtout appréciable chez Harpon, c'est cette noirceur à couper au couteau allant de paire avec un sens du drame suintant à chaque seconde, ce bout de poignant et de désespoir qui se mêle à la rage et dont la rencontre touche au âprement épique et sublime sur Prince Du Sang. A Chaillot est un nouveau morceau de bravoure montant d'un cran dans la frénésie, peut-être bien leur morceau le plus dingue alors que l'ultime Where's Bill ? emprunte un chemin plus expérimental et souterrain. L'issue est pourtant la même. Vous peler les nerfs et vous rendre fiévreux. L'enregistrement de Benoît Courribet (Xnoybis) rend justice à la force de frappe naturelle d'Harpon, dessinant parfaitement les contours crépitants sans atténuer les échardes d'un Harpon qui représente une magnifique et furieuse prise noise-rock sans concession.

SKX (31/05/2017)