pord
solarflare


Pord
Wild - LP
Solar Flare 2014

Le titre du nouvel album de Pord me fait invariablement penser aux paroles de Wild World, une chanson de Birthday Party. It's a wild world, don't push me in a wild world. Et pour sûr, ce deuxième album de la bête lozérienne est sauvage et nous pousse dans les confins d'un monde sans pitié. Ce monde n'est pourtant pas inconnu. Depuis Valparaiso, depuis le récent maxi It's Always Sunny Here, Pord assène avec une rage sans concession les contours d'un noise-rock d'une intensité à couper au couteau. Et le souffle aussi. Plus suffocant qu'eux, il n'y avait que Dazzling Killmen. Et alors qu'on se demandait comme le trio allait pouvoir aller encore plus loin dans l'irrespirable, s'enfoncer plus profond dans la noire férocité, Wild apporte une réponse cinglante. Oui, Pord a fait encore plus fort.
En se rendant d'abord chez Serge Morattel, expert suisse de mise en abîme et en construction planifiée et bétonnée des colères les plus indociles. L'écrin est subtil de sauvagerie et de puissance, de clarté abyssale et de précision diabolique. Dans un tel cadre, Pord a pu faire évoluer son art de la destruction en toute confiance. Faire souffler un vent plus rock'n'roll comme sur I'm Swimming Home ou Staring Into Space entre deux compressions cassantes. Donner de l'amplitude à des compositions gagnant en impact. Serrer les vis comme des malades ou les détacher de la croûte terrestre par un grand saut dans l'inconnu, être pris de l'étrange sensation que plus Pord vous ratatine la gueule et plus vous décollez et ne sentez plus la douleur. Varier les effets, jouer sur les rythmes qui ralentissent, se taisent, passer sa technique en force grâce à une science perverse de la bastonnade se mettant au service des morceaux. Et magnifier ce que le trio savait déjà excellemment faire : mettre une putain de pression, répéter un plan jusqu'au bout du bout de la rupture, rendre dingue et te récupérer à l'ultime seconde avant le pétage de plomb. My Bloody Galantine, tout le milieu de I'm Swimming Home, le fulgurant What Are Tuesdays For enchainant en frénésie avec Pools'n'Chicks, que du titre qui met à genoux et plus bas que ça même.
Et quand tu n'en peux plus, Pord achève la populace avec les 11'25 de On The Couch, renvoyant au péplum de Staying Here du maxi précédent, avec une grandiose et subtile montée instrumentale à partir de la troisième minute se terminant dans un prodigieux éclat de lumière aveuglante. Wild se case direct sur l'étagère des grands disques noise-rock, toutes époques confondues. It's a wild word and you are a wild band.

SKX (16/10/2014)