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Skull Defekts
Street Metal – 12''
Diagonal records 2014

Bon alors, quoi de neuf du côté des Skull Defekts depuis le magnifique Dances In Dreams Of The Known Unknown ? Et bien voici Street Metal, un mini album publié à l’automne 2014 sur Diagonal records, label londonien très arty et expérimental abritant nombres d’artistes dégénérés, de Shit And Shine à Death Comet Crew en passant par Powell et Prostitutes. Et là, c’est la levée de bouclier. Ou tout du moins la méfiance. Parce que les Skull Defekts, en dehors d’une poignée d’albums retentissants (sans ou avec Daniel Higgs au chant) sont également coutumiers d’enregistrer des maxis, EPs ou même des albums entiers dans une veine très expé et la plupart du temps extrêmement pénibles voire impossibles à écouter en entier. OK, j’admets que Joachim Nordwall, membre prépondérant des Skull Defekts, boss de iDEAL recordings, pote de Mika Vaino (Pan Sonic) ou de Kevin Drumm a parfaitement le droit de s’épancher et de nous faire part de ses fantasmes et autres déviances en matière musicale. Sauf que celles-ci, appliquées dans le contexte Skull Defekts, n’ont donc jamais été très concluantes.

Maintenant que j’ai bien fait semblant de dire tout le mal que je ne pense pas de l’un de mes groupes préférés de ces dernières années, je vais passer aux choses sérieuses. Street Metal démarre en fanfare avec Mission, titre instrumental d’excellente facture sur lequel les deux guitares font tourner en boucles des riffs circulaires sur fond de tribalisme percussif. Le son des guitares est à la fois énorme et aigrelet et surtout complètement obsédant. Les Skull Defekts sont toujours les maitres dès qu’il s’agit de faire grimper leur post-punk tourbillonnant sur les sommets de la transe. En deuxième position arrive Mammal Combination, titre sur lequel Daniel Higgs fait son apparition, ça ce n’est pas tout à fait une surprise, un Daniel Higgs toujours aussi druidique c’est-à-dire entre le côté sentencieux d’un vieux prêtre devenu un peu fou et la fulgurance mystique de révélations mystérieuses imposées par une force supérieure. Et moi qui d’ordinaire ne peux pas blairer les curés… Il n’empêche qu’avec ces deux titres Street Metal commence sous les meilleurs auspices, plus précisément pile-poil dans la veine que je préfère chez Skull Defekts. Donc, pour l’instant, tout va bien.

La première face du disque est toutefois occupée par un troisième morceau, instrumental et intitulé Holy Drums Are Singing. Un titre qui rappelle étrangement celui du premier album des Skull Defekts, Blood Spirits & Drums Are Singing, et surtout le premier titre de celui-ci, Unholy Drums Are Singing. Alors, s’agit-il ici d’un retour en arrière ? Effectivement, ce sont plus que des similitudes que l’on décèle entre le titre initial issu d’un album publié en 2007 et celui de Street Metal. Pourtant il y a également des différences, entre autres au niveau de la production qui sur Holy Drums Are Singing sonne beaucoup plus acide, tout en gardant le côté décharné ; les guitares y sont à peine moins présentes mais bien plus aigrelettes, ce qui confère à cette deuxième version (appelons-la comme ça) une dimension plus minérale et bien plus tripale – l’ajout de percussions comme des grelots donnant même un côté shamanique supplémentaire. Mais le plus beau reste Holy Drums (Dub), en début de face B, une longue plage hypnotique qui comme son nom l’indique est une variation de Holy Drums Are Singing : le traitement infligé tourne nettement à la tournerie electro sans rien lâcher du côte viscéral des guitares (pourtant en sourdine) et on comprend mieux alors ce que fout Street Metal sur un label tel que Diagonal.

Reste une dernière composition, Saturday Morning, sur laquelle Daniel Higgs revient à nouveau, à la limite du marmonnage, après une longue intro instrumentale et oppressante, presque crissante. Un titre beaucoup plus classique que ses deux prédécesseurs immédiats, peut-être une façon pour le groupe de rééquilibrer Street Metal, de nous dire quelque chose comme voilà, vous nous attendiez là mais en fait on est ici, ce qui ne nous empêche pas non plus de faire les deux. Street Metal est donc bien plus qu’une simple bonne surprise : on pourra peut-être préférer le côté plus accessible – et chanté – des albums Peer Amid et Dances In Dreams Of The Known Unknown, il n’empêche que 12’ vaut bien tous les albums non expérimentaux qu’ont enregistrés les Skull Defekts avant l’arrivée de Higgs (soit Blood Spirits & Drums Are Singing et The Temple)… A noter qu’il existe une très belle version en vinyle vert du disque, mais comme je suis arrivé trop tard, j’ai du me contenter d’un vinyle noir.

Hazam (02/03/2015)