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White Suns
Totem – LP
The Flenser 2014

S'apprêter à écouter un album de White Suns, c'est se soumettre aux forces telluriques et imprévisibles régissant ce bas monde, accepter le chaos, serrer les fesses surtout. Avoir vécu les deux expériences passées, Waking In The Reservoir et Sinews, peut aider à sauver votre peau. Car Totem, le troisième album des New-Yorkais, continue d’œuvrer à la lisière de l'enfer. Ni plus chaud, ni moins froid mais avec la même implacable intention de vous humilier et vous ôter le goût d'écouter leurs disques. Peine perdue. Masochistes de tous les pays, unissez-vous, Totem est votre nouveau grand manitou.
Agression sauvage, écrasante et assaut frontal contre lente combustion de friches industrielles et triturations électroniques, White Suns oscille toujours entre le noise-punk bruitiste et le mal de crâne, la musique expérimentale, arty et les triturations sonores diaboliques. Sans concession, ne pas cédez un pouce de terrain au confort. Si les albums précédents n'ont pas délicieusement écorché vos tympans, Totem ne remontera pas votre cote d'amour pour White Suns. Je me demande même si White Suns n'a pas poussé le vice encore plus loin avec des morceaux comme Prostrate, Disjecta Membra, Fossil Record, soient trois titres sur cinq de la face A (sans oublier Line of smoke sur la face B) sur lesquels le rythme, dernier bastion auquel s'accrocher, brille par son absence, laissant le champ libre à des crissements, frictions, stridences, bruits lugubres, rythmes désordonnés quand il y a, proche d'une musique concrète et sourde à toute notion de bien-être, bien que Disjecta Membra reste assez délectable dans le genre. Car il faut quand même bien se l'avouer, c'est quand White Suns met du concassage de rythmes, des cris possédés et des strangulations de cordes de guitares, c'est à dire un minimum de vie et de ce qu'on peut appeler le rock - mot à manier avec d’infinies précautions chez White Suns – que le trio est le plus convaincant et jouissif. Des titres comme Priest in the Laboratory, Clairvoyant ou Carrion, c'est pas du carré dans les structures mais l'éclatement et la furie qui se ballade entre les reliefs sont impressionnants, c'est de l'aliénation pure, de l'hystérie sans le grand n'importe quoi, la peur dans les foyers. Il fallait bien un Martin Bisi (Sonic Youth, Swans, Fœtus, Cop Shoot Cop, Unsane, soit une belle ribambelle de malades à laquelle White Suns fait honneur) à l'enregistrement pour maîtriser la bête sommeillant plus que jamais à l'intérieur de White Suns. L'album le plus difficile du trio mais pas le moins inintéressant et dont l'étrange ressemblance avec la pochette de Place Where We Go In Dreams, le nouvel album de Zëro, ne vous aura pas échappé.

SKX (31/03/2014)