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Headwar
Hopital Torture Punition IV - LP
Les Potagers Natures/Label Brique 2011

Le problème de ce disque, c'est de l'avoir découvert après le concert du Fuckfest. Se prendre une bonne claque derrière la nuque, se rendre sur le stand de merchandising séance tenante après être passé par la case bière (faut pas déconner non plus), acheter le présent objet avec le grand sourire du mec qui n'a plus conscience de ce qu'il dépense, déposer sur la platine ce beau vinyl rouge uniface à la splendide pochette Art déco (encore plus terrible que celle du AH Kraken) et s'apprêter à vivre une deuxième séance de torgnoles.
C'est pas qu'on est déçu - enfin si on est déçu - mais pas dans le sens où c'est un mauvais disque. C'est juste que, suite à l'avalanche de sons, l'intensité du choc, le chaos rageur et jouissif de leur performance, cette malheureuse face manque singulièrement de puissance. Et de vie, du truc que l'on sent palpiter au bout des doigts, saigner, déborder des limites de l'acceptable pour vous submerger par une vague incompréhensible mais oh combien salvatrice, comme un bon lavement en profondeur.
Par contre, si on s'attache uniquement aux compositions, on retrouve ces billes. Avec cette grosse pointe de malsain toujours bien présente. Hopital Torture Punition IV est comme un long morceau où les blancs sont remplacés par des samples (issus d'antiques dictaphones à K7) débiles et des bruitages suspects. Des samples qui nuisent à la charge en avant, qui vous arrêtent dans votre élan, un découpage bancal mais pour l'ambiance délétère, c'est parfait. Headwar, c'est de la musique autiste, certains diraient no-wave mais on sent un tel je m'en foutisme et abandon qu'employer le terme no-wave aurait une connotation arty que ce groupe d'Amiens ne mérite pas du tout. C'est tout à leur honneur.
Headwar sort de la décharge, assemble des bruits et des rythmes trouvés par hasard, s'amuse à faire du bordel pour le plaisir d'emmerder et parce que, avant tout, ça leur fait du bien à eux. Taper comme des demeurés, tenir une note à l'infini, faire crisser des guitares sur un tableau industriel, crier à s'en faire péter les cordes vocales, ralentir subitement la cadence, jouer avec les nerfs, laisser planer des doutes et des silences pesants. Dans la série d'outils ayant servi à la construction aléatoire de cet album, outre les guitares allant de deux à cinq cordes, on trouve une barre de fer, une tronçonneuse, un plot, sept chiens, trois voisins et un tas humain pétrifié. Headwar, un exutoire, une soupape du quotidien. Dans le genre musique bruitiste, tribale, primitive, dangereuse, foutrement amateur et de grand n'importe quoi, on n'avait pas entendu ça depuis Headbutt.
Comme d'autres groupes avant eux plus à l'aise sur scène que sur disque, il faut juste désormais réussir à retrouver en studio, cette folie dévastatrice, cette flamme incontrôlée vue en concert et il n'y aura pas que le locked groove qui tournera en boucle mais leur futur disque. Si jamais futur signifie quelquechose pour Headwar.

SKX (13/05/2011)