bug
interstellar


Bug
Lux Ultima – LP
Interstellar records 2023

2021 was a shitty year. Et c’est même pas la peine de parler de 2020. Il suffit de regarder sur l’insert la photo de groupe masqué, les paupières lourdes et le regard très noir, dépité du chanteur Dolp pour se dire que Bug a traversé cette crise sanitaire comme un long cauchemar paranoïaque. Mais c’est pas un petit virus de rien du tout qui va venir à bout de Bug. Le vénérable groupe autrichien a la peau dure. Alors Bug s’est remis au travail au printemps 2023 et publie son septième album depuis 1998 (sans oublier trois split longs formats avec Turn Out, Sensual Love et 27).
Après Nunc Finis, Bug continue de se piquer de latin en titrant Lux Ultima. Toujours cette idée que tout est terminé. Que l’espoir a la consistance d’un suppositoire. Bug est la preuve vivante du contraire. Le groupe d’Innsbruck a foi en son noise-rock. Une foi féroce. Depuis toujours. Et rien ne vaut un sale virus pour décupler sa force. Bug sort les crocs, met le paquet, fait gronder et résonner les fondations d’un style qui tremble sous la lourdeur des coups et un chant vérolé qui crache ses glaires et son venin provocant. Markus Dolp racle au plus profond de sa rage de quoi alimenter sa propre folie donnant envie de gratter le trottoir avec les dents.
Les responsables de la musique, ce sont les trois autres. Oliver Altmayer (batterie), Andreas Deutinger (basse) et Pete Hofer (guitare) se mettent au diapason de l’ambiance fin du monde des paroles. Trois gars qui font la musique et un autre le malin derrière le micro, ça peut rappeler d’autres groupes, genre, au hasard, Jesus Lizard. Difficile de croire que Bug n’est pas insensible (mais qui ne l’est pas ?!) à la douce mélopée des maîtres de Chicago. Ça flotte dans l’air plus sûrement qu’une section rythmique pétaradante sur Free Britney ou les accords glissés de la guitare sur I Bark At Nothing. Bug a bien sûr depuis toutes ces années aisément su creuser son propre sillon mais vous avez là matière à planter le décor.
Que Bug fait voler en éclats sur des accès colériques mémorables avec mega blast dans les gencives sur God’s Hell, du gras et un surplus de massiveté sur SNAFU (pour Situation Normal All Fucked Up) qui broie dans les grandes largeurs, de l’entraînant qui mord les mollets (Grinning Cat et Only Dead Fish Swim With The Stream) alors que Virol a tout de la claque puissante et directe ressemblant au morceau à mettre en avant si vous voulez faire découvrir Bug sous les meilleures conditions. Bref, Bug a plus d’une corde à son arc noise-rock et la plus dangereuse, voire la plus venimeuse, c’est quand il prend une trajectoire sinueuse et que la lenteur s’invite au bal. Possible de s’attendre à tout. Entre les six minutes de GNTM (pour Germanys Next Top Model) et le final quasi aussi long de No Tomorrow (Life Is Good est également pas mal dans le genre retors), Bug s’en prend aux nerfs et à la gorge qu’il sert doucement mais sûrement avec plein de secousses autour pour que la torture dure plus longtemps. Un peu de samples bien sentis pour rajouter à l’angoisse générale et Bug parachève un disque total et sans pitié. Lux Ultima. La dernière lumière. Ce qui n’empêche pas Bug de briller encore une fois.

SKX (23/03/2024)