bug
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Bug
Nunc Finis – LP
Rock Is Hell records 2020

Bug, ça vient du Tyrol et c’est pas du folklore de carte-postale. Plus de vingt ans que le groupe d’Innsbruck sort des disques. Nunc Finis est le septième album. Et c’est toujours un secret bien gardé. Bug vit en vase clos. A tel point que le précédent disque Calamitas en 2017 était passé inaperçu, contrairement à Atropos en 2014. Mais Bug est une sangsue et s’accroche à la vie pour continuer de la faire saigner. Et ça coule noir. A base de Happy Pills pour ne pas devenir dingue, des paroles qui causent dépression et suicide, d’enfer vide puisque tous les démons sont sur terre, d’âmes perdues, de QAnon et complots faciles pour chier en société. Vous avez le bonjour de l’Autriche.
Alors Nunc Finis gronde, alourdit la masse autant que les nuages noirs d’un noise-rock qui a toujours été porté sur la puissance et le matraquage. Bug resserre l’étau. Tout en augmentant l’habileté et la précision. Avec l’âge, Bug devient une entité de plus en plus fine et machiavélique. Les structures échafaudées multiplient les angles d’attaque, bétonnent, dévoilent de sacrées failles dans lesquelles des accents mélodiques s’insèrent, crochètent violemment et frontalement, manifestent des références à Jesus Lizard ou se font plus massives qu’un âne mort. Déchaînement rythmique sur Hell Is Empty qui prend subitement de plein fouet en plein milieu de la blitzkrieg un gros missile provoquant un trou béant pour faire changer de direction un morceau prenant une profondeur ténébreuse et dramatiquement intense. Car Bug s’y connaît aussi en lenteur vénéneuse, en mélancolie virile. Bug aime quand ça rampe, quand c’est lancinant, que les accords deviennent émouvants et qu’il n’y a plus rien à sauver en ce bas monde. Lost Soul et Hass Gegen Rechts, deux superbes moments d’un groupe moins brutal qu’il en a l’air. Bug joue serré, tendu et avec clairvoyance, des plans rythmiques rigoureux qui dévalent les pentes et un chanteur, Dolp, toujours aussi fou, hargneux, provocateur et pas avare en mots qui foutent les jetons. Avec quelques samples biens sentis et placés, style Willpower de Today Is The Day avec femme au bord de la crise de nerf à la fin de Leftovers. I lost everyone. I lost everything. There is no happiness. What’s next ? What’s fucking next ? Nothing is next. Nothing. Jusqu’à l’infini avec un sillon en mode bloqué sur la forêt qui bruisse et de charmants gazouillis d’oiseaux. Nunc Finis. Maintenant la fin. Ça sonne comme un adieu mais ça serait vraiment dommage car on a toujours besoin d’un Bug pour vous secouer dans de grandes et belles largeurs. Aussi confidentiel soit-il.

SKX (11/10/2020)