Terminal Cheesecake
Le Sacre Du Lièvre – LP
Box records 2019

La chasse est ouverte. Sauf que le gibier est le chasseur et le lièvre va pouvoir pulluler et gambader à son aise. Terminal Cheesecake, c’est la réalité déformée, la vie perçue sous un angle très décalé, une autre compréhension des turpitudes terrestres dont les Anglais en font un grand feu de joie psychédéliquement malade.
Revenu d’entre les morts en 2016 avec Dandelion Sauce Of The Ancients, les cultissimes Terminal Cheesecake remettent une seconde couche avec un titre d’album (comme la pochette) toujours aussi cabalistique dont eux seuls ont la clef (et encore). Le Sacre Du Lièvre sanctifie avant tout Terminal Cheesecake comme un groupe aussi unique que furieusement impénétrable. Le chaos est l’essence même de leur musique. Tout est poussé à fond. Leur approche du rock est plus assourdissante, plus surdimensionnée, plus corrosive, plus déphasée. Quelque soit l’extrémité par laquelle Terminal Cheesecake aborde le problème.
Ainsi, pour Le Sacre Du Lièvre, les Anglais sont capables de vous estourbir dès le surpuissant Wipey’s Revenge et la basse ravageuse de Dave Cochrane (God, Head Of David) alors que le titre suivant, South Sea Wall, ressemble pendant huit minutes à un long supplice vaporeux parsemé d’échardes venimeuses, une chute au ralenti dans un gouffre étroit aux parois lisses. Déconcertant. Terminal Cheesecake en a toujours fait qu’à sa tête.
Ce huitième album les voit encore plus imprévisible. Monstrueux et liquide. Le Sacre Du Lièvre passe du coq à l’âne. Il a fallu un peu de temps pour suivre les traces désordonnées de cette nouvelle drôle de bestiole et surtout apprécier dans l’ensemble un album aux compositions moins évidentes. Mais la drogue a peu à peu fait son effet et, tout en restant un ton en-dessous de Dandelion Sauce Of The Ancients, Le Sacre Du Lièvre impose sa folie retorse, sa confusion pleine de surprises, ses sauvages élans de noise sulfureuse et lourde (quand Cochrane empoigne sa basse, c’est quand même quelque chose. Outre Wipey’s Revenge, Bull Of The Woods ou V.D.K. Neck avec l’aide du batteur John Jobbagy pourfendent les montagnes) se cognant à des murs invisibles derrière lesquels se font entendre d’étranges lutins grimés de sourires machiavéliques et des guitares tarées.
Le rock-noise psyche génétiquement modifié de Terminal Cheesecake est et sera toujours une expérience dangereusement planante, bordéliquement rentre-dedans, sans cesse inattendue et sans équivalent. C’est pour ça qu’on les aime. Pour toutes ces grandioses imperfections, cette musique défoncée qui secoue et perturbe. Le Sacre Du Lièvre est une très belle pièce à rajouter à leur improbable collection.

SKX (09/12/2019)
terminalcheescake
box