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Pylone
Silence – LP
Kerviniou/Rejuvenation/Bruisson/A Tant Rêver Du Roi/Gabu records 2018

Pylone rebranche le courant. Cinq années après Things That Are Better Left Unspoken suivi d'un split avec Magneto un an plus tard, Pylone sort de son silence. Ce qui tombe bien puisque c'est le nom du second album des Toulousains (ou assimilés). Mais aucun rapport. Il faut chercher dans le titre de ce disque un rapport avec le précédent, une suite logique, une thématique que Pylone continue de creuser. Ce qu'il vaut mieux ne pas dire, il faut le garder sous silence. Comme une profession de foi, un mantra asséné dans les paroles du premier morceau pour annoncer la couleur : C'est en observant quelqu'un écouter le silence, que l'on sait vraiment à qui on a affaire. Alors on écoute Silence et on voit ce qu'il a dans le ventre, ce qu'il a à nous dire.

Le propos d'ensemble ne diffère pas vraiment des précédents enregistrements. Pylone reste une entité noise-rock subtile, cérébrale, âpre, possédant l'art de l'esquive, pesant sur les volumes, les reliefs, maniant, triturant la tension, sur un fil, toujours. Un courant venant de Chicago comme sur la rythmique très Jesus Lizard de Twin, la sécheresse du noise-rock, son coté implacable. Mais également et je l'avais moins senti venir sur Things That Are Better Left Unspoken, une touche Hoover/Crownhate Ruin dans l'habileté à ventiler ses émotions, insinuer du sensible dans des atmosphères tendues, les explosions contrôlées, une intensité qui ne dit jamais son nom, jouer avec les nerfs pour créer au final un Silence froidement beau et hypnotique. Ce n'est pas toujours celui qui crie le plus fort qui se fait entendre. Dans un monde en émeute saturé d'infos, Pylone étend ses propres antennes et sait capter l'attention sans hurler, en manipulant le silence, en passant sur les cotés, avec calme et sang-froid.

Cependant, Pylone a augmenté la dose de rock. Les contrastes sont plus marqués. Les riffs sculptent des mélodies plus acérées et subjuguantes. La pression se fait plus vigoureuse. Ça donne des compos gagnant en consistance, en longueur en bouche, en chaleur aussi, qui font leur nid peu à peu, sur lesquelles il est permis de rêver, comme mué par une force invisible qui rassure autant qu'elle oblige à rester sur le qui-vive. Et avec le chant où le français prend une place grandissante, la diction particulière et unique du chanteur et des textes à la poésie touchante (dont trois sont de John Fante, François Cavanna et Bukowski), Silence est non seulement d'or, il montre que Pylone a une position très singulière dans le paysage noise français pour un groupe qui se fait rare hélas et mérite votre plus grande attention.

SKX (22/12/2018)