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Swans
The Glowing Man – 3xLPs
Young God/Mute 2016


The Glowing Man, l'homme rayonnant, celui qui s'embrase ? Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite. Mais si vous pensez très fort à Michael Gira, personne ne vous en voudra, bien que le leader des Swans s'en défende. Qu'importe, cette image de brillance, de lumière et de ciel rouge illuminé sied parfaitement à ce nouveau triple album venant clôturer la trilogie entamée avec The Seer puis To Be Kind. Trois albums indissociables balayant des contrées musicales identiques et shamanesques.
Cependant, avec The Glowing Man, les Swans franchissent un palier supplémentaire dans l'extase. A tel point que les premières écoutes sont passées un peu au-dessus de mes frêles épaules de terrien. Sans compter que l'effet de surprise n'est plus franchement là. On savait à quoi s'attendre avec The Glowing Man. Et on l'a eu dans les grandes largeurs. Les morceaux péplums dépassant allègrement les vingt minutes. Les immenses et inexorables montées en puissance. Le vertige devant les étendues infinies. La transe qui en découle. Deux heures de musique comme un long vaisseau fantôme, irréelles et angoissantes. Plus que jamais, la musique des Swans donne le sentiment de flotter, de se détacher de son propre corps pour survoler un territoire à la violence sous-jacente, une atmosphère délicatement opprimante, l'impression d'être continuellement dans l’œil du cyclone tout en évitant les dommages collatéraux mais également parmi ce que les Swans ont fait de plus simple et lumineux, léger et direct malgré les longs développements fourmillant d'arrangements. Ou alors c'est tout le talent de Gira et sa bande d'avoir réussi à atteindre un stade où toutes les complexités sonnent limpides, toutes les écorchures et arabesques devenues ondes porteuses flamboyantes.
Les Swans sont arrivés avec The Glowing Man à faire très fort et très caressant, très sombre et merveilleusement lumineux. La vie, la mort. Détruire ou être détruit. Les contrastes sont magnifiés. Jusqu'à la terrible ironie du sort avec le morceau When Will I Return chanté par la femme de Gira et relatant une agression qu'elle avait subie sept ans auparavant alors que Gira a été accusé de viol au début de l'année par l'artiste Larkin Grimm pendant l'enregistrement de son disque en 2008. The Glowing Man et sa face maléfique.

Encore une fois, comme pour les deux précédents disques, il est impossible de passer en revue la richesse de chaque morceau de ce disque fleuve. Les seules vingt minutes de Frankie M ou l'éponyme The Glowing Man devraient suffire à éclaircir votre morne quotidien, à vous transporter dans une nouvelle dimension dans laquelle abandon et plénitude sont les maîtres mots. Et ces trois albums devraient suffire aussi à déniaiser et ridiculiser tous les post-rockers et Mogwai en herbe de la terre banalement empêtrés dans leurs montagnes russes soi-disant émotionnelles avec leur brouhaha électrique. Swans vole et voit plus loin que le commun des mortels.
The Glowing Man signe hélas la fin de la formation qui accompagnait Gira depuis l'album de reformation en 2010. Exit Norman Westberg, Phil Puleo, Christoph Hahn, Thor Harris et Christopher Pravdica. L'insatiable Michael Gira se sentait arriver à la fin d'un cycle. Espérons que le nouveau s'affirmera aussi essentiel et hors-norme.

SKX (31/08/2016)