neurosis
neurot


Neurosis
Fires Within Fires – LP
Neurot 2016

Fires Within Fires. Car c'est bien de ça au final qu'il s'agit. Le feu qui brûle toujours à l'intérieur. Le feu qui alimente les braises. Le feu sacré qui ne cesse de crépiter depuis 30 années de service. Le feu personnel à l'intérieur du feu général ou quand l'histoire d'un groupe n'arrête pas d'allumer une petite étincelle au fond du bide à chaque fois qu'il sort un disque. Vous avez ceux qui ont mis Neurosis au rebut depuis The Eye Of Every Storm, voir dès A Sun That Never Sets, ceux qui les ont définitivement brocarder avec l'avant-dernier Honor Found In Decay, sans compter ceux qui n'ont jamais pu les encadrer mais là, on peut vraiment rien pour ces pauvres hères. Chacun a son histoire avec Neurosis. La mienne est faite de haut, de très très haut et de quelques bas, très rare.

Fires Within Fires est le onzième album d'une riche carrière qui en a influencé plus d'un. Il est sans surprise et pourtant, très prenant. On ne leur demande pas - on ne leur demande plus - de publier un Souls At Zero à chaque album. Fini cette époque. Neurosis a jeté tout son feu. Il est passé à un autre stade. Le groupe de cinquantenaires n'a plus rien à prouver sinon se faire plaisir et toujours faire passer le frisson, ce que Fires Within Fires arrive sans problème. Ça s'apparente même à un beau retour de flamme. Il retrouve de l'intensité par rapport à un Honor Found In Decay qui avait mis du temps à rallumer la chaudière. Plus de contrastes, plus de rage, plus de riffs qui visent juste et de mélodies qui font vibrer. Un album plus inspiré tout simplement. Et court. Même pas trois quarts d'heure pour du Neurosis, c'est une grande première. Neurosis a raccourci le tir, c'est concentré sur l'écriture. Il en résulte cinq morceaux plus simples et directs, retrouvant de l'impulsion. Pas de longs passages qui peuvent diluer le propos bien que Fires Within Fires débute de cette façon avec Bending Light et sa calme introduction qui s'étire dangereusement. Mais ça, c'est avant la brusque explosion dont Neurosis a retrouvé le goût. Des parpaings, des rythmes pachydermiques, des riffs qui écrasent les plus blasés nourrissent l'antre de Fires Within Fires. Il en résulte des titres qui ont du nerf et de la grandeur comme A Shadow Memory, Fire Is The End Lesson ou Reach, des morceaux avec une fibre émotionnelle pour mieux prendre aux tripes tout en se télescopant à une enveloppe âpre taillée par Albini, sans autant d'enluminures que dans les albums précédents, ce qui n'empêche pas un habillage sonore plein de finesses, de bruitages démoniaques de la part de Noah Landis et de titres qui décollent malgré le plomb aux semelles. Sans oublier toute l'urgence et la folie dans les cordes vocales de Scott Kelly et Steve Von Till qui, en dépit de leurs expériences folk en solo, savent encore comment hurler à la lune.

Neurosis possède désormais quelque chose de touchant, ne fait plus peur comme avant, n'invoque plus les ténèbres avec une force tellurique et gravite ainsi dans une sphère où l'ancien et de nouveaux desseins magnétiques cohabitent. Le groupe d'Oakland continue donc de suivre sa propre voie comme il le fait depuis Souls A Zero. Et le feu brille plus que jamais d'une belle ardeur.

SKX (13/12/2016)