neurosis
relapse
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Neurosis
Honor Found In Decay - 2xLPs
Relapse/Neurot 2012

Vingt ans après la pierre angulaire Souls at Zero, Neurosis est toujours là. Monstre sacré, culte vivant, influence majeure ou bande de vieux pachydermes dont la place est au musée, le groupe de San Francisco poursuit son chemin, faisant fi des fans transis et des chacals puants. Neurosis a toujours écouté que lui-même, sans regarder derrière, jouant la musique que son cœur et ses tripes lui dictaient de faire, avec sans cesse un coup d'avance.
Honor Found in Decay est le dixième album de Neurosis. Ils sont reconnaissables au premier coup d'oreille et pourtant, cet album ne ressemble à aucun de leurs disques précédents. Malgré les habituels gros riffs et les rythmes tribaux ou qui plombent, Honor Found in Decay est leur album le plus calme. Certes, on peut trouver ce disque ennuyeux - et je n'étais pas loin de le penser au début - mais Neurosis ne s'écoute pas comme un album de Metz. Ca ne vous gicle pas dessus à la première pression. Le temps travaille pour eux, ce qui en ces temps de consommation rapide n'est pas chose aisée. Il faut de la patience, de l'attention pour pénétrer peu à peu dans les méandres des morceaux à rallonge (sept en une heure), pour avoir une chance d'apercevoir la lumière. Pour Honor Found in Decay, encore plus que les autres albums. Il n'a pas la véhémence de la jeunesse, des fulgurances mélodiques qui rendent dingue tout de suite, des joutes rythmiques qui te font sentir tout petit, une tension infernale dans des constructions échevelées comme seul Neurosis sait le faire. Non, calme dans le sens introspectif et pas mou du genou. Calme dans le sens narratif, conté sur une même ligne de crête. Les contrastes entres les déflagrations et les périodes d'apaisement sont toujours présents mais tendent à se fondre dans le paysage, dans des compositions compactes et homogènes.
Honor Found in Decay
n'est pas un album tape à l'oeil mais puise sa force dans des morceaux patiemment élaborés. L'enrichissement des samples et des trouvailles sonores de Noah Landis, les chants cathartiques de Steve Von Till et Scott Kelly vous emmenant dans les entrailles noires de leurs esprits torturés, les mélodies se révélant au fil des écoutes, la puissance et la sobriété de la section rythmique, tout participe à une mise en place irrésistible, une force contre laquelle il est impossible de lutter. La masse sombre décolle, prend de l'ampleur et bien que je ne sois jamais très objectif quand il s'agit de parler de Neurosis, il faut reconnaître une nouvelle fois que Neurosis touche une corde sensible bien enfouie que eux seuls semblent capable d'atteindre. Il ne faut pas chercher à toujours tout expliquer. Neurosis est un groupe unique et Honor Found in Decay les voit encore en haut de la pyramide au pied de laquelle bêle le reste du troupeau pendant qu'ils continuent à regarder toujours plus loin.

Ce disque est sorti en octobre 2012 mais il a fallu attendre février 2013 pour la version vinyle. Comme d'habitude, l'artwork de Neurosis a toujours quelquechose d'embarrassant mais la pochette gatefold, les deux vinyles de 180 grammes et le livret de 15 pages font le poids d'un arbre mort et valaient bien cette attente. Neurosis mérite d'ailleurs toujours notre attente.

SKX (18/02/2013)