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Anasazi
Nasty Witch Rock – LP
La Vida Es Un Mus/Toxic State 2015

Rarement un groupe n'aura si bien choisi le nom de son album. Du méchant rock maléfique. Du rude, du sale pas fait pour les pieds tendres. Le son est tellement parasité que le premier réflexe a été de regarder si une fine couche de poussière ne s'était pas immiscée discrètement dans les sillons. Ou se dire que le mixage avait été foiré. C'est touffu, comme rongé de l'intérieur, un enregistrement que l'on doit à Ben Greenberg (Pygmy Shrews, Zs, Uniform, The Men et derrière les manettes de plein d'autres furieux groupes tarés et bruyants). On comprend soudainement beaucoup mieux. C'est déstabilisant à la première écoute mais on s'y fait très rapidement quand on a été élevé en plein air à l'école du bruit. Potards dans le rouge, tout le monde à niveau identique, fréquences atomisées, le bonheur à l'état brut.
Le groupe de New-York n'est pourtant pas né ainsi. Sur leurs deux premiers singles en 2012 (I Saw The Witch City sur Sacred Bones et Attic Noise sur Toxic State) et le split LP avec Survival en 2013, le son était moins sale, encrant Anasazi dans une mouvance post-punk/death-rock légèrement tordue. D'ailleurs, deux titres du split (Horror At The Mass et Morbid Native) sont repris sur ce premier album. Le nouvel enregistrement leur confère une dimension autrement plus sauvage. Voir assourdissante. Anasazi a donc bien fait de mettre les deux mains jusqu'aux oreilles dans le cambouis. De s'enfoncer la tête dans les amplis dans un bel élan suicidaire. Les instruments se bouffent entre eux. Saturations, grésillements, ça vie, ça chauffe, ça coule ces derniers jours et tout le monde se marre.
Des accélérations comme s'ils ne pouvaient contenir le feu bouillonnant en eux. Et par dessus tout ce merveilleux bordel, des compositions épiques. Le nerf de la guerre qui rend le bruit plus beau, plus fort. Le guitariste regorge de riffs lumineux, d'attaques de cordes d'où surgissent des notes venimeuses et séductrices pendant que le chanteur s'égosille en mode Jello Biafra, en mode parlé ou secondé par le chant mélodieux de la bassiste. Le death-rock est éclaté par une fière attitude punk à la In/Humanity et des éclats noise à la Creeps On Candy ou Year Future et un sombre chaos que n'aurait pas renié Birthday Party. Les neuf compositions débordent d'une énergie, d'une hargne et d'une classe folle sous le déluge, de mélodies lumineuses qu'il faut chercher sous les gravats. Ce qui ne nécessite en fait que très peu d'effort tant cet album est un véritable brûlot jaillissant à la gueule comme sur les meilleurs classiques punks.
Sur le petit livret rouge fourni avec le poster, il est écrit sur la première page : When used correctly, this record is a key to the door of your wildest nightmares. Alors mettez tout à fond et laissez vous faire. Ce disque est sorti depuis plus d'un an déjà. Ça aurait été vraiment dommage de le rater. Royal.

SKX (17/03/2016)