xiuxiu
polyvinyl



Xiu Xiu
Angel Guts : Red Classroom - LP
Polyvinyl 2014

Tripailles et viscères, sexe et misère, Xiu Xiu continue de creuser vers l'enfer. X en forme de sabre au clair, James Stewart monte une nouvelle fois au front à visage découvert, plus dénudé que jamais. Angel Guts : Red Classroom est le dixième album de Xiu Xiu et toujours aucun signe de rédemption. Pire, c'est sans doute le disque le plus noir et violent d'une imposante discographie pas réputée pour sa légèreté de vivre. Et le plus intéressant depuis The Air Force. Les derniers n'avaient rien d'honteux, Always avait fini par se révéler plaisant mais avec Angel Guts : Red Classroom, Xiu Xiu retrouve un élan, un second souffle qui font les grands disques.
De l'importance de l'environnement d'un artiste pour son inspiration. Quittant la Caroline du Nord pour s'installer à Los Angeles, Stewart a semblé très marqué par son nouveau quartier mal famé dont il ne connaissait pas la triste notoriété avant d'y poser ses cartons, avec les gangs, les meurtres, les viols et les découvertes macabres au fond du gentil lac avoisinant. Armé seulement de synthés analogiques, d'une boite à rythmes et d'une vraie batterie/percussions jouées par Thor Harris (Swans) et Shayna Dunkelman, Stewart épure son attirail pour dégainer ses angoisses et ses propos scabreux. C'est toujours du Xiu Xiu mais un Xiu Xiu sensiblement différent, tendance plus electro. Sa musique a toujours été riche en samples, machines, synthés, bidouilles sonores et autres arrangements osés. Sur Angel Guts : Red Classroom, l'electro se drape de sombre, se fait plus prégnante, resserre le propos. Ça n'empêche pas d'avoir des cris de cochons sur Adult Friends et autres effets baroques surprenants typique du monde de Xiu Xiu. Mais electro ne rime pas avec bricolo et les cris du cochon filent les jetons. Xiu Xiu se permet même un morceau introductif (Angel Guts) faisant la part belle au dépouillement, au drone quasi silencieux pendant plus de trois minutes. Un bel exploit pour le volubile Stewart. Après, ce sont tapis de sonorités froides, rythmes dansants glaçants comme sur le splendide Stupid in the Dark alternant avec des synthés et dérèglements à la Suicide. Des nappes de noirceur, des stridences, du groove malsain et des paroles à l'avenant comme sur Black Dick, la collaboration de Stewart avec Eugene Robinson ayant sans doute laissé des traces et illustré par une vidéo hyper explicite, censurée de partout sauf sur les sites de cul que vous n'aurez aucun mal à trouver, bande de petit(e)s pervers(es).
L'album est perclus d'atmosphères flippantes comme sur El Naco ou Cinthya's Unisex, morceau le plus dingue, dans tous les sens du terme, de son répertoire. Le chant de Stewart est allumé, collant parfaitement à la folie ambiante. Des mélodies tordues de douleur qu'il faut savoir entendre, plus de sobriété et de retenue que d'habitude avec des titres qui prennent aux tripes comme Bitter Melon et ses cloches célestes et la procession funeste de Botanica de Los Angeles. De la dépravation d'où ressort de la beauté, une beauté lugubre, dérangeante et quatorze titres qui s'étalent devant vous dans toute leur magnifique déchéance. Xiu Xiu est définitivement unique dans le paysage musical, une perle rare et signe, après douze ans d'activité, son meilleur album à ce jour.

SKX (13/03/2014)