xiuxiu
bellaunion


Xiu Xiu
Always - LP+CD
Bella Union 2012

Xiu Xiu tatoué pour la vie sur la peau de James Stewart. C'est la même problématique pour l'auditeur tombé dans la marmite Xiu Xiu dès le premier album Knife Play. Impossible de s'en dépêtrer, quand bien même on le voudrait. Ca vous suit, ça vous colle, on voudrait le cacher mais on ne peut pas. Tatouage indélébile, on n'y fait plus attention, on l'oublie mais à chaque nouvelle sortie, on se sent obligé d'y jeter un oeil. Chose à moitié honteuse qu'on ne comprend pas toujours pourquoi on a été se l'incruster dans le cortex mais on sait qu'un jour, on a adoré ça.
Mine de rien, Always est le neuvième album depuis 2002, belle moyenne, et représente le cap le plus difficile à franchir dans la dure vie d'auditeur de Xiu Xiu. Dans le monde luxuriant, précieux, bidouillé de Xiu Xiu, dans cette pop électronique, baroque et unique en son genre, Always fait avaler quelques couleuvres. On a toujours apprécié ce groupe parce qu'il nous met sur la tangente, il nous fait ravaler nos principes et douter de nos penchants. Avec Always, Xiu Xiu appuie là où ça fait mal, accentue le coté années 80, ressortir comme un gros bouton noir purulent Depeche Mode, New Order (Joy Division étant tapis dans l'ombre) et Morrissey, son ami pour la vie. Les beats se font plus ouvertement dansants, les sonorités kitschs, les arrangements de l'impossible et boderline surgissent de l'esprit torturé de Jamie Stewart qui n'avance plus masqué. Malgré l'aspect mécano et assemblage en tout genre si chère à la recette Xiu Xiu, les compositions apparaissent plus fluides, la barque moins chargée et incompréhensible. Il faut donc serrer les fesses sur les quatre premiers titres, craindre le pire sur Hi, faire un violent effort pour ne pas fondre sous le pathos et la pop new-wave de Honey Suckle en collaboration avec Angela Seo, nouvelle égérie de Xiu Xiu.
Il faut surtout porter un amour improbable pour ce groupe afin de continuer à écouter cet album. Effort récompensé. La nouveauté chez Xiu Xiu, c'est que James Stewart ne compose plus seul. Zac Pennington (Parenthetical Girls), Sam Mickens (The Dead Science), Carla Bozulich, John Dietrich (Deerhoof), Angela Seo, Ches Smith, Devin Hoff ont participé à l'écriture de ces douze morceaux, faisant de Always un album plus varié qu'il n'y parait. Le sauvant par la même occasion. Xiu Xiu, c'est quand il est le plus torturé qu'il est encore le meilleur et des morceaux comme I Luv Abortion ou Black Drum Machine, jamais loin du chaos ou d'un Evangelista en version synth-punk, comptent parmi les pièces maîtresses de sa discographie. Xiu Xiu, c'est quand il n'essaye plus de faire danser les foules, même gauchement, qu'il vous prend aux tripes. Le chant affecté de Stewart prend une tout autre dimension, son duo avec Bozulich sur Smear The Queen est un mariage aussi heureux que sidérant. Xiu Xiu, c'est quand il n'essaye de ne pas en faire des tonnes qu'il vous touche le plus. Un seul piano, un peu d'habillage synthétique dans le fond et The Oldness évite toute grandiloquence pour faire dans une sobriété touchante, dont Factory Girl est le sublime écho. Stewart peut alors jouer au romantique suranné, à l'extraverti de service mettant toutes ses souffrances sur la table, Xiu Xiu devient une machinerie inquiétante, un univers lugubre, un animal mythique provoquant peur et rejet chez certains, profonde attraction chez d'autres, refaisant sortir l'encre noire du tatouage qui n'est pas prête de s'effacer, malgré les zones d'ombres.

SKX (13/03/2012)