replicator
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radioisdown

Replicator
Winterval - CD
Feedback Loop Industries 2001
You Are Under Surveillance - CD
Substandard 2004
Machines Will Always Let You Down - CD
Radio Is Down 2007
Whangbar Province - CDEP
Radio Is Down 2011

La sortie de l'album de Cartographer a remis au goût du jour leur précédent groupe tombé dans l'oubli, perdu dans la masse. Impardonnable. Replicator était composé de Ben Adrian (basse) et Chris Boiling (batterie), soit les deux tiers de Cartographer, plus un chanteur-guitariste dont le nom vous calme tout de suite : Conan Neutron. Huit années de service, trois albums au compteur et un EP trois titres sur lesquels on va revenir. Manque à l'appel un autre single quatre titres parus en 2002 et un split EP avec Lower-Forty Eight en 2003, répondant au nom sibyllin de ddbbLL VVzznn.
Huit années de service sans faille. Dans le digipack du dernier EP Whangbar Province est plié un volumineux poster avec une imposante oraison funèbre de Conan Neutron. I never told people I " played in a band ", I played in Replicator. Un groupe qu'il considérait comme sa famille, appréciant chaque minute passée avec ses deux frères d'armes, ces frères de différentes mères, préférant splitter tant qu'ils étaient au top de la vague et de leurs possibilités. Un groupe d'Oakland aux paroles engagées, sarcastiques, pessimistes, un de ces nombreux soldats de la route dont l'anonymat ne les empêchait pas d'enquiller les kilomètres et de croire dur comme fer en chaque disque, chaque chanson écrite. On ne peut pas leur donner tort. Un groupe qui s'est amélioré ensemble, évoluant sensiblement à chaque sortie, durcissant le ton de leur noise-rock, appellation générique et pratique où on peut caser pas mal de choses.




Sur Winterval justement, Replicator ne se contente pas d'une seule sonorité, d'une seule approche. Si l'ensemble est porté sur le bruit, c'est plus souvent la tendance indie/college rock. A faire penser à du Pavement en version musclée sur Motivationally Challenged. Un noise-rock vibrant et mélodique dont les lignes de guitares sont parfois un peu trop brouillonnes, tout comme le chant en équilibre précaire et à l'image des structures pas toujours très clairs. Il faut toute la science de Robert S. Weston IV à l'enregistrement pour éclairer le propos et donner du clinquant à des compos comportant tout de même de beaux moments de persuasion. Le disque finit sur Taxi Driving, une surprenante ballade du dimanche au piano, avec un voile de batterie et de guitare dans le fond.




En 2004, Replicator revient avec des intentions identiques tout en consolidant les acquis et en densifiant la manière. Le bassiste Dan Kennedy est remplacé par Ben Adrian qui officie également à l'enregistrement et au mixage. You are under surveillance. Replicator, avec ou sans Weston, se rapproche de Chicago et de Shellac tout en étant différent. Va comprendre. Replicator ne se contente pas d'être des maniaques d'une rythmique impeccable et indéboulonnable, de cingler l'air comme des robots neurasthéniques. Ils offrent aussi un bordel plus naturel, une propension à brouiller les pistes, une complexité dont on se demande où ils vont bien finir par atterir, tout en offrant des mélodies insoupçonnables. D'une manière générale, ce sont les compos qui gagnent du galon, bien plus matures et solides. Rajouter à ce disque de la paranoïa, quelques samples discrets, des bidules electro, toujours le fidèle piano, des chants à plusieurs, du synthé, des manipulations audio et You Are Under Surveillance est un album de noise-rock qui penche vers beaucoup de frontières (Frodus, qui luttait aussi contre le grand capitalisme, n'est pas la dernière) et se débrouille très bien tout seul.




Il faut attendre à nouveau trois ans pour avoir des nouvelles de Replicator. Machines Will Always Let You Down mais pas Replicator. Le trio continue de creuser pour trouver la pépite noise-rock ultime. Et il s'en approche. Toujours entre décontraction et angularité, entre mélodies sinueuses et complexités abrasives, Replicator maîtrise de plus en plus son sujet. Enregistré cette fois par Vern Rumsey (Unwound), Replicator garde l'optique d'un son agressive dans des morceaux où le fun n'est pas absent (King Shit of Fuck Mountain) et n'est pas loin de gagner son combat contre la technologie, grand thème de cet album. Parce que Replicator n'est pas et n'a jamais été un monstre noise-rock froid, austère et sans âme. De la chaleur rock'n'roll, il en a toujours été grandement question chez le trio. Ecoutez la huitième piste par exemple, The Tiny Machines are (still) out for Revenge et il vous sera difficile de rester de marbre.



Les trois morceaux de Whangbar Province ont été enregistrés en 2008 (par Ben Adrian) mais semblent n'être sorti que très récemment, en 2011. Une sortie pour la forme, pour que ça ne reste pas dormir au fond d'un disque dur. Ils ont bien fait les bougres. 100 exemplaires uniquement, numérotés (le n° 5 en moins désormais) avec design et crédit tamponnés sur un digipack cartonné à languette et un épais poster plié en douze à l'intérieur. Photos retraçant toute leur brillante carrière de losers et de l'autre coté, un dessin/logo appelé Replibot signé par Dale Flattum. Et de Dale Flattum, je n'en connais qu'un, celui de Steel Pole Bath Tub.
Trois titres dans la lignée de l'album précédent avec ce qui est peut-être le meilleur titre de tout leur répertoire, le tout dernier que Replicator a composé, histoire de confirmer qu'ils se sont séparés au meilleur de leur forme. Barely Regal, cinq minutes méchamment sous tension comme un bon vieux Craw, est un pur… régal ! Une reprise également, Arthur Jermyn, par le groupe Babyland, vieux groupe cyber-new-wave-indus cinglé de Los Angeles toujours en activité et cette cover n'est pas loin de l'être aussi. Cinglé, je veux dire. Un disque pour mieux nous faire regretter la fin du groupe parce que mon petit doigt me dit que Replicator n'avait pas fini d'être au meilleur de leur forme.

La preuve avec Cartographer alors que Conan Neutron est parti s'amuser avec Mount Vicious et Victory & Associates, sans oublier Guitar vs. Gravity, autre projet pas dégueulasse du tout de Ben Adrian.

SKX (04/09/2011)