hella
sargenthouse


Hella
Tripper - LP
Sargent House 2011

Jamais je n'aurais pensé un jour redire du bien de Hella. Je les croyais perdu à tout jamais, empêtrer dans leurs bouzes surdimensionnées qui se nommaient Church Gone Wild ou There is no 666 in Outer Space. Voir carrément perdu tout court puisqu'on était sans nouvelle de Hella depuis 2007. Chacun vaquait à ses occupations, avec plus de malheur que de bonheur, tout aussi empêtré dans des projets solos ou des collaborations stériles. Spencer Heim (guitare) et Zach Hill (batterie) viennent de rebrancher le courant. Retour au duo historique sacré. Chanteur lynché sur la place publique. Les autres musiciens remerciés à coup de pied au cul. Alors tant qu'à revenir aux bases, autant reprendre le manche là où Hold Your Horse Is nous avait mis un énorme coup de bâton avant de peu à peu lâcher prise. La pochette a pourtant de quoi faire peur vu comme ça. Mais une fois ce superbe gatefold entre les mains, s'ouvrant sur les mêmes motifs qui vous arrachent les yeux, on se retrouve avec une suite logique de leur premier album. Comme si rien ne s'était passé entre. Tripper n'est pour autant pas un Hold Your Horse Is bis. C'est le bras armé, celui qui te fout une torgnole encore plus virulente. Ils vous avaient déjà fait le coup, on était prévenu mais ça fait aussi mal. Les baguettes de Hill vous démontent la colonne vertébrale. L'animal ne s'est pas calmé, tentaculaire, démonstratif mais diablement efficace. D'une telle débauche et furia qu'il fait oublier toutes autres considérations. On sait qu'il en met partout, on connaît le bougre mais sur Tripper, il trouve le dosage idéal. L'évolution la plus palpable viendrait plus de Spencer Heim. Fini le tapping de malade, fini de faire courir à tout va ses petits doigts stressés sur le manche de sa guitare. C'est pas le genre à se calmer mais il le fait différemment. Par vagues, par convulsions, avec un son presque synthétique se confondant avec les keyboards qui s'intercalent dès qu'ils peuvent, donnant un aspect encore plus compact mais respirable à Tripper. Alors oui, c'est de la haute volée, c'est pas pour les manchots mais le souffle l'emporte aisément sur la technique. Ca vous agrippe par le colbac, vous malmène dans tous les sens, ça vous met la tête sous l'éteignoir mais c'est surtout virevoltant, trépidant, oxygénant, avec des bouts de mélodies qui pendent, des envolées incroyablement intenses, des bouts d'avant-garde et d'expérimentations, des détours vers la musique bruitiste, du rock en mode atomique, un dialogue qui n'est pas de sourd entre deux musiciens autistes mais qui reviennent à ce qui savent faire de mieux. Du math-rock de folie.
Souvent copié, jamais égalé, Hella démontre, une fois stoppées les conneries, qu'ils restent les maîtres du genre. Incroyable retour sur le devant de la scène.

SKX (17/10/2011)