The Somnambulist
Moda Borderline - CD
Acid Cobra 2010

La maison étant adepte des jeux de mots foireux, on peut aisément dire que The Somnambulist pratique une musique à dormir debout. Dans le sens incroyable et invraisemblable. Trois personnes d'horizons très divers se croisant à Berlin, ville carrefour, ville du tout est possible et des mélanges, le résultat ne pouvait être qu'une rencontre hybride, surprenante. Un Italien (Marco Bianciardi), un Français, un Allemand malgré le nom (Marcello S. Busato), tous berlinois d'intégration, à la fertile imagination. Un passé chargé pour ces trois là, toutes expériences est bonne à prendre, véritable catalogue vivant de toutes les musiques du monde. Pour le Français de la bande, Rafael Bord, dans La République Sauvage avec L'Enfance Rouge, soit une première piste musicale. La seconde pourrait être Les Hurlements D'Léo où le Français, toujours lui, a œuvré pendant dix ans mais non, ne fuyez pas, fausse piste, il n'en a ramené que sa panoplie de violons, son oud et le thérémine, pas l'esprit punk baloche alternatif. On se détend.
En fait, de pistes, une multitude s'offre à l'écoute de Moda Borderline, premier album. A chaque disque déroutant, on s'accroche aux branches. Vous n'échapperez donc pas à la litanie des références. A Tom Waits, pour la voix enfumée de Biancardi, à une pop ubuesque, symphonique (le grandiose Red Carpet pour ouvrir l'album), à Motherhead Bug, la fanfare des villes qui met du vitriol dans les cordes, à L'Enfance Rouge et tout particulièrement leur dernier album Trapani Halq al Waady, quand l'orient se joint au punk, que l'oud se marie à l'électricité et vous transporte sur un Luce hypnotisant. Et de l'hypnose, il en est question sur les huit titres. Jusqu'à l'obsession avec 80s Violence. Charme envoûtant d'une mélodie arabisante, d'une voix rauque, de special guests qui apportent tout leur savoir faire dans des arrangements subtiles et d'une violence lardée surgissant sur la fin. Chaque morceau révèle une ambiance personnelle sans que le fil rouge n'en pâtisse. Rythmique en constante recherche/richesse. Moda Borderline, la compo, ouvertement la plus rock et percutante à des compos plus abstraites et funambulesque. L'instrumental Quinto Mistero Della Gioia, God Is Not A Good Shot, condensé de toute la variété que ce groupe peut offrir ou Alice Never, final presque léger et valsant. Toute une vie de musiciens ouverts et prêts à tout, lâchés dans Berlin, ville hôte experte en groupes étrangers qui, comme The Somnambulist, ont su puiser dans cette vieille Europe, l'inspiration pour aller à l'encontre de nouveaux horizons, avec un supplément de profondeur. Singulier et captivant album.

SKX (01/11/2010)