The Gordons

Dépoussiérons un mythe vieux de 25 ans ! The Gordons, ça ne vous dit sans doute pas grand chose mais tout être humain qui a approché les disques de The Gordons s'en retrouve changé à tout jamais. Bon j'exagère je sais, mais la découverte de ce groupe est primordial. Et même pour ceux qui connaissent, un peu de révision ne vous fera pas de mal tant on a tendance à oublier ce groupe. Pour cela, il faut s'imposer un voyage, même dans les rêves, en Nouvelle-Zélande. Mars 1980, The Gordons joue son premier concert à Christchurch. Après que leur van soit tombé en panne à Wellington en plein milieu de leur première tournée, ils en profitent pour enregistrer des compos connues sous le nom de Sausage Studio. Hélas, l'ingénieur efface malencontreusement tout le travail !
Octobre 1980, ils sortent leur premier single en forme de 12'' sur le naissant Flying Nun records. Ca s'appelle Future Shock. Trois titres de zombies. Rythmes minimalistes. Ligne de basse sur une seule corde. Répétitifs. Guitares par vagues, acérées. Voix de désespéré dans le fond. Le trio John Halvorsen (guitare, voix), Alister Parker (guitare, voix) et Brent Mclaughlin (batterie) va à l'essentiel et impose déjà les bases d'une musique agressive et monolithique.
Mais c'est avec leur premier et unique album à ce jour, connu sous le nom de 1st album ou encore Volume 1 (toujours ce goût pour le minimalisme maladif) qu'éclate leur talent. Nous sommes en octobre 81 et le trio va jusqu'au bout de ses névroses. Le trio a progressé techniquement. La répétition du rythme, la tension qu'il crée à force, cet étrange malaise. I can see what's on the air, répété à l'infini sur Spik and Span, cette brusque explosion, retour à cette tension sous-jacente avant une fin de morceau sur laquelle on pourrait presque danser. Ca continue sur Right on Time puis Coalminers Songs. Une construction autour d'un simple riff, d'un refrain et sentir la chape de plomb sur ses épaules. La face A est bouclée sur trois morceaux stressant d'où s'échappent des éclairs mélodiques. On les imagine en concert arc-boutés sur leurs instruments, à se cogner la tête contre les murs. Si vous allez faire un tour sur le site de Fying Nun, vous pouvez d'ailleurs lire cette citation du Melody Maker après un concert des Gordons :

"When they played at the same size venue as Motorhead they required four extra P.A. sound systems. Saying The Gordons were LOUD is like saying the Beatles were a POP GROUP - not so much detonating as devastating!" (Everett True, Melody Maker).

Face B, quatre autres morceaux dont le magnifique Growing up pour lequel on se demande si Slint n'avait pas déjà écouté les Gordons ?! Puis la fin dans la débauche avec Laughing Now ne donnant pas envie de rire, des guitares vrillantes et cette tension qui ne dit jamais vraiment son nom. L'album laisse place à des dynamiques plus fluctuantes que le maxi, des humeurs où percent des rayons de soleil sous le désespoir sans cesse latent. Mais cela reste un disque mystérieux, un bloc incontournable laissant peu de place à l'auditeur pour le pénétrer. Même maintenant, on a du mal à imaginer que ce truc, cet ovni puisse avoir été enregistré en 1981 (et en 22 heures, mixage compris !). Ces gars, sur leur bout d'île du bout du monde, avaient 15 ans d'avance ! De leurs confrères de l'époque, on pourrait tout juste les rapprocher des The Fall, Wire et compagnie, cette façon mécanique mais non dénuée d'humanité d'appréhender le monde.

Entre 1984 et 1986, The Gordons se reforment. Ils décident d'enregistrer les fameuses sessions du Sausage Studio perdues en 1980, les filent à Jarem, un label de Wellington mais font machine arrière et décident de garder tout ça dans leur coffre-fort. Maudites à jamais, personne n'entendra ces morceaux que le groupe décide de cacher à tout jamais…
Future Shock et leur album apparaîtront plus tard sur un CD, toujours sur Flying Nun, la dernière réédition datant de 2002.

Ensuite, Parker part former Nelsh Bailter Space avec notamment Hamish Kilgour, l'ex-The Clean. Halvorsen les rejoint un peu plus tard pour devenir définitivement les Bailter Space. Halvorsen formera également The Skeptics. Tout ceci fournira peut-être l'occasion d'autres oldies mais jamais ces groupes n'arriveront à la moitié de la cheville des Gordons.

SKX (07/11/2005)

Mise à jour du 04/12/2006 :

Après quelques recherches pointues, il apparaît que ce deuxième album a bien vu le jour. Je vous souhaite bien du courage. Jamais vu. Seul les méandres de Soulseek m'ont permis d'en avoir les mp3s…. Pour cette reformation, John Halvorsen et Brent Mclaughlin avaient décidé de s'appeler The Sheep Effect avant de se raviser, d'enrôler un nouveau bassiste (Vince Parker) et de sortir cet album toujours sous le nom de The Gordons. Il apparaît également que ce sont uniquement des nouvelles compos et non pas ces sessions du Sausage Studio perdues en 1980… En tout cas, la première écoute déroute. Mais quand vous vous rappelez leur groupe d'après (Bailter Space), cet album est le pont logique entre les deux formations. On retrouve ce coté lancinant, répétitif mais dans un traitement sonore qui n'est pas à la hauteur et court-circuité par des élans new-wave bien dans l'air du temps (on est en 1984 !). The Chameleons n'est pas loin ! On a même du mal à croire que c'est le même groupe. Certains morceaux sont pâlement basiques, rock-new-waveux sans saveur et toute la fièvre et l'originalité de The Gordons sont évaporées. Sans doute pour cette raison que Halvorsen n'a jamais voulu rééditer cet album ! Pour la curiosité…

Discographie ::

Future Shock 12"
Flying Nun records 1980


s/t LP
Flying Nun records 1981


Volume II LP
Self-released - 1984


Discography CD (Future Shock 12'' + s/t LP)
Fying Nun records 2002