
vegg
|
Vegg
Anthropophobie – CD
self-released 2023
Vegg ressort de sa tanière. Après quatre années depuis
Triste
Taille et une pandémie pendant laquelle le groupe parisien
a mis au point son quatrième album, Anthropophobie. La peur
des autres, zéro relation sociale, le confinement volontaire. Ce
titre n’annonce pas l’allégresse et la bombance.
Ce qui n’est pas une surprise vu la tronche des précédents
enregistrements qui labouraient un terreau fertile en désarroi
et sourde colère. Et rien de tel qu’un chant en français
pour encore mieux se rendre compte des dégoûts de Vegg. C’est
le gros changement notable chez ce quartet, le passage de l’anglais
à leur langue natale. L’évolution est validée
sans aucun problème. Le poids des mots et leur bon choix, plus
parlés et assénés que chantés, pénétrer
l’esprit sans entrave, que ça frappe juste et pleinement.
Participer à la douleur ambiante car la musique de Vegg ne désemplit
pas de cette gravité qui sonne authentique. Dans un bouillonnement
mouvant jetant des ponts entre noise-rock et post-hardcore avec une retenue
et un décalage oblique leur permettant de ne jamais affronter ces
styles de plein fouet et d’aspirer à une navigation entre
deux eaux. Voir de multiples eaux. Sculptant ainsi des compositions finement
élaborées et menées, ne se laissant pas attraper
dans les filets de la facilité, d’apparence revêches
mais qui remuent de l’intérieur. C’est un vrai travail
d’orfèvre que de savoir jouer et associer tout un panel d’émotions
contradictoires, surfer sur une crête où chaque détail
compte pour que ça tienne la route et encore mieux, que ça
l’enflamme, sans en faire des tonnes mais avec une belle sincérité.
Vegg a ça dans la peau et le montre une nouvelle fois avec Anthropophobie.
Sept titres se dévoilant au fil des écoutes, rugueux, mélodiques,
colériques, intenses, plus apaisés et mélancoliques
parfois, sombres toujours, tortueux puis débouchant sur des claques,
avec des rythmiques appuyées, alertes, tribales, des guitares qui
grattent l’épiderme, l’électrisent, fouettent
le sang et le cicatrisent. Et surtout de nombreuses belles inspirations
comme sur ce passage basse-batterie de 20130213 (chaque titre correspond
à un évènement en relation avec le sujet abordé
avec tout de même un sous-titre qui ici s’appelle Seum Scolaire)
qui soutient le chant avec son Allons enfants du calme sur une
amorce d’hymne national, le haletant 20200525 (I Can’t
Breathe) ou le plus énervé et tendu 20191116
(Alt Science).
Au risque de se répéter et de sortir le même refrain
à chaque sortie de ce groupe, Vegg est un groupe trop rare qui
encore une fois fait l’étalage d’un sacré talent
en toute modestie pour publier un album qui mérite grandement votre
attention. N’ayez pas peur d’Anthropophobie.
SKX (28/03/2023)
|
|