forêt
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Forêt
Faulkner Songs – LP
Mr Morezon records 2021

Forêt fait feu de tout bois et débite un quatrième album, Faulkner Songs, à peine un peu plus d’un an après Ma Walki. Le blues desséché de Nicolas Lafourest qui se camoufle en solitaire derrière Forêt, pseudo aussi générique que sa musique est personnelle, continue de faire planer des ombres tremblantes magnifiques et fragiles. Et décide d’épurer encore un peu plus le concept. Déjà que c’était minimal avec seulement une guitare électrique et strictement rien d’autres. Cette fois-ci, il vire les effets, joue dans son plus simple appareil. Juste six cordes électrisées, dix doigts et beaucoup de coeur. Plus une prise de son live par Christophe Calastreng car il fallait que ça sonne et le rendu est impeccable. Avec Forêt, on y voit que du feu.
Forêt crépite toujours d’une flamme intimiste qui parle au plus grand monde, un langage simple, d’une grande sobriété mais d’une ampleur puissante, d’une portée ouvrant bien des brèches dans les cerveaux confinés en quête d’échappatoire. Débarrassé de toutes fioritures (à peine un peu de bottleneck sur Untitled#3 et un filet de voix sur Untitled#) et sans chercher la complication dans les structures, Forêt se concentre plus que jamais sur la mélodie. Elle est triturée, agitée dans tous les sens parfois dans un élan free, passant sans prévenir d’accords désordonnés à l’apaisement total. C’est âpre, intimement violent mais c’est souvent sinon tout le temps très beau comme le sublime Untitled#5 ou Untitled#4 qui met la larme à l’oeil, une pleine besace de notes lumineuses et honteusement inspirées, d’harmonies crépusculaires ou assagies, d’accords frappés, trépidants (Untitled#9), glissés, étouffés, sombrant dans le silence pour mieux rejaillir avec l’évidence que ces compos dépouillées possèdent la grande classe et que ce gars là a de l’or dans les mains. Forêt suit son instinct, n’obéit à aucunes règles, interprète son histoire et sa petite musique interne avec intensité, nerveusement, fébrilement et c’est une franche réussite. Il faudrait vraiment être de bois pour rester insensible à Forêt. Faulkner Songs jusqu’à l’agonie.

SKX (02/06/2021)