
cabale
greed
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Cabale
s/t EP – CD
Greed recordings 2021
Le genre de groupe qui vous prend par surprise. Un disque qui s’annonçait
sympathique et gentiment classique mais qui va s’avérer bien
plus que ça. Un disque qui n’avait l’air de rien, se
déroulant sans tapage, sans clinquant, sans signes extérieurs
de richesse mais qui va doucement vous retourner, vous prendre par la
main et vous emmener dans ses drôles de sombres profondeurs et ne
plus vous lâcher.
Il n’a fallu qu’une grosse minute à Ditch, morceau
d’ouverture d’un album ne comportant que six compos, pour faire
relever le sourcil au détour d’un court refrain et surtout
une ligne vocale pleine de promesses. L’envoûtement est en
route.
C’est un trio des plus basiques, c’est rock, c’est dissonant
mais le terme noise ne peut lui être associer. C’est âpre,
sobre, presque sec mais c’est hautement inflammable et ce ne sont
pas les étincelles qui vont manquer. C’est précis,
rigoureux, rien ne dépasse, pas un geste de trop mais c’est
d’une élégance naturelle saisissante, une classe infinie.
Ça rappelle tout un pan de la scène rock indé 90’s
mais c’est au final très personnel, l’impression de débarquer
sans être invité dans leur intimité.
Cabale, un groupe quelque part en France, trois musiciens qui n’en
sont pas à leur premier essai, la démonstration de tout
leur talent en quasiment trente minutes. La colère contre l'injustice
rend la voix rauque disait le poète. Le chant du bassiste Rabih
Gebeile vous harponne, subtilement éraillé et enfumé,
puissant et fragile dans le même souffle. Un chant égrenant
des mélodies magnifiquement prenantes au bout de ses cordes cassées,
alternant avec du spoken-word qui m’a fait croire sur le début
de Enemies que Pete Simonelli avait été invité.
J’ai eu beau regarder dans tous les sens les crédits du digipack,
nulle mention du chanteur d’Enablers. Un point fort de la musique
de Cabale parfaitement soutenu par la guitare de Michel Malégeant,
les ciselures finement noisy, les arpèges magnétiques, les
riffs qui coupent subitement et toujours ce souci mélodique très
présent dans ce rock sobrement charpenté par la batterie
de Arthur Travert (qui a aussi enregistré les six titres qui sonnent
d’enfer) et dont la charge émotionnelle est très forte
comme sur le splendide Secrets, beau comme un blues électrique
de Come. Au détour de Félix et l’intégration
de samples idéalement intégrés pour servir l’ambiance
de la compo et non faire du remplissage comme c’est trop souvent
le cas, Cabale flirte avec le post-rock avant de s’échapper
dans une incroyable et intense envolée mélodique dont le
trio a le secret. Et ce n’est pas le moindre des mystères
d’une musique s’avérant aussi abrupte qu’épique,
mesurée et chaleureuse, profondément abrasive, violemment
mélancolique. Non, je n’attendais rien de ce bout de disque
mais il va fortement compter. Fascinant.
SKX (23/03/2021)


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