liveskull
bronson


Live Skull
Saturday Night Massacre – LP
Bronson records 2019

Live Skull, c’est l’exemple type du groupe culte. Adoré par ses pairs et acclamé par la critique, une influence pour de nombreux groupes, contemporains ou futurs, une référence dans le noise-rock en devenir pendant les années 80 mais zéro succès commercial et oublié de tous, contrairement à Sonic Youth ou Swans avec qui ils sont régulièrement casés bien que musicalement différent. Cela situe l’importance du groupe mais Live Skull n’a récupéré que les miettes. Trente ans que la vie s’est achevée pour les emblématiques new-yorkais.
Live Skull revient à la surprise générale et il ne promet pas la fièvre du samedi soir mais le massacre. Le massacre des illusions d’un monde qui n’a pas changé, d’un monde que le groupe a quitté sous Reagan et qu’il récupère avec Trump. Entre la peste et le choléra, Live Skull a finalement opté pour Nixon puisque Saturday Night Massacre est le nom donné en 1973 par les journalistes américains au (samedi) soir lors duquel trois procureurs furent mis à pied ou présentèrent leurs démissions durant le Watergate. Dans tous les cas, une belle brochette représentative de la grandeur et l’intégrité de la vie politique américaine (vous pouvez accorder ces qualificatifs avec le pays de votre choix, ça marche à tous les coups).

Live Skull semble donc revenir le mords aux dents, prêt à en découdre. Comme en 1989. Mais ce n’est pas le cas. Déjà parce que du personnel de l’époque, il ne reste plus que Mark C., guitare et chant et que son alter-ego à la guitare, Tom Paine, n’est pas de la partie et c’est bien dommage. A la batterie, Rich Hutchins, présent sur les deux derniers albums (Snuffer et Positraction) et qui avait commencé à prendre le pouvoir sur Dusted en lieu et place du batteur d’origine James Lo, est par contre toujours là. Et puis c’est tout. La bassiste Marnie Greenholz fait un tour sur Up Against The Wall mais c’est uniquement pour chanter (elle est remplacée par un nouveau, Kent Heine). Et l’autre chanteuse légendaire de Live Skull, Thalia Zedek (Come, E), n’est présente que sur deux morceaux pour prêter sa voix si unique.
Live Skull démarre donc un nouveau chapitre et je dois avouer que si ce disque n’était pas sorti sous le nom de Live Skull, je ne me serais jamais arrêter dessus parce que dans l’ensemble, c’est très laborieux. Cela fait quelques mois que cet album tourne sur la platine, que je tente de lui donner toutes les chances possibles pour que le déclic se produise mais il faut se rendre à l’évidence, les compos ne sont pas emballantes. J’ai essayé d’oublier le passé, oublier que les deux guitares ensemble possédaient quelque chose d’étrange et magique donnant tout le charme des mélodies de Live Skull, l’écouter avec une oreille neuve et s’adapter à l’omniprésence des synthés que Mark C. manipule comme s’il voulait remplacer une guitare absente, l’aborder comme une nouvelle entité entamant une vie nouvelle mais quand l’inspiration n’est pas présente, que les gestes sont rouillés, l’envoûtement retombe platement.
Il est possible de sauver une poignée de morceaux comme Identical Skies et Saturday Night Massacre qui possèdent de l’allant, les deux titres avec Zedek (Nova Police et Midnight Zone) parce qu’il suffit qu’elle chante pour éclairer n’importe quel titre moyen à la base ou Shadow War parce que le synthé ne vient pas pour une fois tout gâcher et se marie assez bien avec la guitare. Pour le reste, les compos naviguent entre sonorités bancales voire poussiéreuses (maudit synthé mais la guitare n’est pas en reste), psychédélisme d’un goût douteux, banalités plus ou moins noisy, sur des compos qui font de la peine comme les stressants et limites Up Against The Wall et Memory Time Sleep, Never Kill A Client ou The Date, ennuyeux et balourds. Même le groove de Details Of A Madness semble totalement dépassé, suranné. Le retour des anciens est rarement couronné de succès. Saturday Night Massacre à plus d’un titre.
Mais si vous ne connaissez pas Live Skull, que cela ne vous décourage surtout pas d’écouter tous les précédents enregistrements de la grande époque. J’y retourne d’ailleurs de ce pas.

SKX (02/03/2020)