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Girl Band
The Talkies – LP
Rough Trade records 2019

The Talkies possède tous les éléments pour me plaire, comme son prédécesseur Holding Hands With Jamie. Pourtant, ça ressemble à une forteresse imprenable et je cherche toujours la faille pour m’y introduire et me repaître des bienfaits que les quatre Dublinois ont l’habitude de dispenser.
Le sens perçant du bruit, l’art de la dissonance et du larsen dans les gencives, l’éclatement des structures et le jus strident qui en découle avec ce qu’il faut d’humanité et d’arrondis sous les angles pour ne pas faire (totalement) fuir le chaland sous le bombardement ambiant, les données sont au complet dans The Talkies. Le problème, c’est que tout ce bordel si attirant ne fait pas des chansons qui comptent. Contrairement au premier album.
Girl Band accroît son approche expérimentale, cherche des sonorités/procédés du coté de la techno et l’électro pour les marier au rock, s’amuse à tout casser, retire subitement du mix des instruments pour mieux les faire réapparaître, passe des bandes à l’envers, agence différemment, devient encore plus bruitiste, chaotique, éruptif. La guitare a rejeté toutes idées d’accords ou arpèges et ne sait plus que grincer, triturer, construire une texture de bruits revêches. Le bassiste suit une tendance identique, partenaire de crime idéal pour détourner l’usage ordinaire de son instrument et lui infliger maintes supplices. Le batteur cogne, trépigne et triture lui aussi ses peaux pendant que le chanteur couine à la lune en essayant d’utiliser un large panel de cris. Bref, de quoi mettre en appétit.
Mais cela débouche sur des morceaux décousus et recousus comme ils peuvent, des morceaux dans lesquels on a envie de croire mais pas forcément d’écouter régulièrement, des collisions permanentes qui ne créent pas de miracles, un tas d’idées mises bout à bout ne formant pas à la fin des titres cohérents et prenants, un fil conducteur impossible à trouver. Sans oublier des morceaux qui n’en sont pas vraiment, juste des bouts d’ambiances tordues avec Akineton, Amygdala ou Ereignis, espèce d’interludes qui ne font que brouiller un peu plus la perception générale d’une musique qui tape dans tous les coins sans laisser d’émotions particulières, ainsi que Prolix ouvrant l’album et qui voit le chanteur avoir l’étonnant réflexe de s’enregistrer alors qu’il connaît une énième attaque d’angoisse. Ça pourrait planter le décor mais apparaît surtout comme le symbole d’une folie mise en scène bien qu’il soit hors de propos de remettre en question le désordre mental du chanteur Dara Kiely qui ne fait pas mine d’aller mal, ceci expliquant la mise en veille du groupe pendant quatre ans.
Mais à force de vouloir composer une musique cinglée, Girl Band finit par se perdre en route, comme des gamins très joueurs et turbulents qui ne savent plus quoi faire de leur trop plein d’énergie et de leur imagination débordante. Ce n’est pas que cet album soit mauvais ou détestable, c’est juste qu’il semble vain et usant, une volonté de désordre et d’innovation sans le cœur qui parle avec les idées claires.

SKX (20/01/2020)