foxeagle
lastdisorder


Foxeagle
Waves On Water – CDEP
Last Disorder records 2020

A l’intérieur du digipack, un bref texte de Stendhal sur la beauté de la ville de Florence, sur l’émotion qui a étreint l’écrivain, ébloui jusqu’au malaise. Et qui sera connu plus tard sous le nom du syndrome de Stendhal pour tous les voyageurs subjugés par ce lieu. Il n’est pas question de comparer le CD de Foxeagle avec cette ville d’art par excellence. Cependant, avec Waves On Water, on est aussi dans le domaine de l’émotion pure, le ressenti, le truc qui fait des papillons dans le bide et ne s’explique pas.
Foxeagle est le projet et la musique d’une seule personne. Émilie Célarier. Vous pouvez essayer de coller toutes les étiquettes musicales que vous voulez, comparer à tel ou tel groupe, invoquer le slowcore, Slint, Low, la darkwave ou tous les autres courants passant par votre prisme personnel, c’est peine perdue. Waves On Water se détache de toutes ces considérations, va bien au-delà ou en-dedans, qu’importe. C’est un battement très sombre, très beau, une profonde vibration intime qui parle à tout le monde ou plus précisément qui murmure à l’instar de ce chant détaché, parfois à peine audible, comme irréel. Et qui résonne d’autant plus dans la lente puissance et la sobriété extrême que dégagent les cinq longs titres de Waves On Water. Une impression de dénuement, une page vierge que Foxeagle a peinte en lâchant prise, puiser dans ses états d’âme les plus obscurs et confidentiels pour les faire remonter avec une grande pudeur, dessiner des mouvements répétitifs s’accumulant pour former un bloc aussi dense qu’aérien, esquisser des ondulations, jouer sur les fréquences, dompter avec élégance l’électricité grésillante, créer de magnifiques harmonies pour donner vie à des morceaux à la sourde intensité, explosant au ralenti, distillant une adrénaline qui tétanise et des mélodies crépusculaires et superbement magnétiques. Il suffit d’une guitare, une batterie frappant avec parcimonie, un chant, la basse de l’invité Geoffroy Pacot (Don Aman) sur Suits pour engendrer des morceaux d’une grande force comme Stendhal (Syndrome) ou Haunted Land, un disque d’une saisissante simplicité et pourtant intensément épique. Si ça ne vous touche pas, si un énorme frisson ne parcourt pas votre épiderme à l’écoute de Waves On Water, c’est que vous êtes déjà morts.

SKX (21/12/2020)