exhalants
hex


Exhalants
Atonement – LP
Hex records 2020

Après un premier album usé jusqu’à la corde, Exhalants revient à temps avec un nouvel enregistrement. Et il va faire date. Le trio d’Austin passe la vitesse supérieure alors qu’il roulait déjà grand train. Exhalants pousse les murs, sort la cuirasse, prend du coffre, augmente le volume, durcit le ton et tout ça sans artifice ni pilule magique, uniquement à la force du poignet, grâce à une volonté de fer et le savoir-faire de Jasper Den Hartigh aux manettes. Impressionnant. A tel point que la basse pour ne citer qu’elle sort littéralement de ses gonds et explose à la face du monde. Une lourdeur nouvelle, une puissance accrue au service d’une écriture toujours cinq étoiles, ça fait des albums en béton brillant.
L’aspect brutal et punitif d’Atonement est donc bien réel, du noise-rock qui ne fait pas mine d’être à la pointe de l’urgence avec l’intensité comme seconde peau et trois titres pour débuter qui ont des têtes de magnifiques vainqueurs. Exhalants connaît la chanson et le petit lexique du noise-rock sur le bout des doigts, l’importance d’une section rythmique impitoyable, la beauté des dissonances qui s’enflamment au moindre touché et avec ce second album, le trio texan n’a pas de concurrence ou si peu car il le fait mieux que quiconque, avec une fougue et une inspiration bénies des dieux. Mais ce qui fait d’Atonement un disque au-dessus de la mêlée, ce petit plus qui le rend indispensable, c’est la profondeur émotionnelle que le groupe diffuse au sein de ce tir de barrage, leur capacité à la retenue, l’aspect mélodique si poignant et qui semble si naturel rendant les compositions encore plus dynamiques et bouleversantes. C’est le cas sur Definitions et End Scenes qui du haut de leurs cinq minutes et quelques montrent toute l’étendue de la palette structurelle, de reliefs changeants, de tonalités et de sentiments dont est capable Exhalants. Mais c’est aussi d’actualité sur des morceaux qui s’annonçaient impitoyables comme The Thorn You Carry In Yr Side à l’ambiance plombée, dense et qui pourtant place des arpèges qu’il est possible de qualifier d’agréables et d’accalmies qui n’ont jamais paru aussi belles. La puissance chez Exhalants ne se mesure pas avec le volume, la violence du propos ou la force de frappe mais grâce aux climats qu’ils ont su sculpter et mettre en valeur en y mettant plus de cœur que de physique. Un disque qui n’est que morceaux de haute volée avec l’écorché Blackened ou Richard et Crucifix qui dans le jeu de guitare ou la ligne de basse ne sont pas sans rappeler combien Jesus Lizard reste une influence majeure. Et puis, non pas le meilleur pour la fin parce que vous aurez compris que tout est bon dans Atonement, mais le plus épique, le plus long et le plus étonnant, les neuf minutes de Lake Song pour terminer l’album. Une trompettiste (Nicole Kayani) qui va vous faire pleurer et un violoncelliste (Graham Low) sont invités pour l’occasion sur ce titre puissant comme un titre d’Engine Kid époque Angel Wings, beau comme du Slint qui se retient d’exploser et unique comme du Exhalants qui rajoute une corde à son arc déjà copieusement fourni. Exhalants a sorti son Into The Vortex à lui. Essentiel et plus que ça.

SKX (12/11/2020)