bruxamaria
hominidsounds



Bruxa Maria
The Maddening – LP
Hominid Sounds records 2020

Le tant attendu second album après Human Condition de Bruxa Maria est là et il a littéralement explosé la platine. The Maddening, comme un avertissement à l’apocalypse qui nous guette. Un disque comme un raz-de-marée qui ne va faire qu’une bouffée de nos cerveaux ramollis, un souffle énorme et suffocant. On a beau avoir été averti par Human Condition et les deux courts enregistrements entre les deux pour patienter (le split avec Casual Nun et l’autre avec MoE), The Maddening prend à la gorge et emmène dans les tréfonds de la crasse humaine et la noise la plus pure qu’il soit sans espoir de remonter à la surface.
Wayne Adams s’est occupé du cas The Maddening. C’est synonyme d’un enregistrement multipliant les couches sonores, rajoutant du bordel sur le bordel, croisant des sources de bruits angoissants, instables, stridents, empilant et triturant les effets des guitares de Gill Dread, manipulant son chant qui se dédouble, se triple, se déforme, formant ainsi un mur du son diaboliquement orchestré et saisissant. L’impression folle que ça déboule de partout, que ça vous assaille de tous les coins tout en entendant parfaitement bien tout ce qui s’y passe. Monstrueusement bon.
D’ailleurs, une personne (Robbie Judkins) est créditée à la ligne Noise et fait partie intégrante de Bruxa Maria. Au même titre que le bassiste Dave Cochrane (Terminal Cheesecake, God, Head Of David) et du batteur Paul Antony qui n’étaient pas de l’aventure Human Condition, ce qui ne change rien à la texture profonde de Bruxa Maria. Un groupe de noise-rock radical, expérimental, allant chercher bien au-delà des codes d’un genre donné pour alimenter le feu qui bouillonne en eux et sa principale protagoniste Gill Dread. Trash, metal, hardcore, electronic, techno, punk, industriel. Tout passe à l’intérieur de leur moulinette mutante. Sans les poncifs, en ne gardant que le meilleur.
Et c’est recracher avec autant de virulence que de talent avec une putain d’énergie rock. Une folie domptée tant bien que mal par des riffs férocement mordants qui dérapent dans les sifflements. Des chevauchées effrénées de rythmes (The Maddening ouvrant l’album après que les cymbales/cloches ont sonné le tocsin pour prévenir de la guerre qui se prépare) stoppant brutalement avant le ravin. Des hurlements dans les aigus, comme accélérés, pitchés pour passer à un chant clair, nettoyé d’effets. Des compos qui peuvent sonner méchamment basique pour du Bruxa Maria (Manual Labour vs. Office Dickheads ou Mr. Hardcore Lives Next Door) et viennent se brûler dans les affres bruitistes de Pushed To The Brink Of Madness Then Demonised où la basse de Cochrane s’en donne à cœur joie pendant que des sons grouillants et des samples indéterminés créent une ambiance de catastrophe avec voix agitées et cris de détresse se mélangant dans un maelstrom flippant et vertigineux.
The Shock Into Behold! permet de reprendre son souffle. Mais les cris lointains ne tardent pas à remonter à la surface comme des fantômes venant hanter la nuit de promoteurs sacrifiant la vie des gens sur l’autel de la réduction des coûts de construction avec le sample final d’un commentaire sur les survivants de l’incendie de la tour Grenfell à Londres en juin 2017 qui ont dû se prendre en charge eux-mêmes pour palier l’incompétente des autorités. Car Bruxa Maria n’a pas le bruit gratuit et nihiliste malgré toute la noirceur prégnante. Un groupe engagé. Dans les paroles et dans l’attitude avec le reversement d’un euro par disque vendu à une association s’occupant des migrants en Angleterre (The Windrush Justice Fund). Et qui garde espoir en terminant cet album fantastique par le superbe Zaragoza, morceau le plus mélodique du répertoire de Bruxa Maria qui donne envie de chanter avec Dread. The Maddening parce que l’époque est complètement dingue et c’est une parfaite bande-son pour la supporter.

SKX (01/04/2020)