mammapappabarn






Mamma Pappa Barn
Utan Förvarning – CD
self-released records 2019

Mamma Pappa Barn, ça signifie maman papa enfant en suédois, c’est aussi le titre d’une comédie à l’eau de rose en 2003 et tout ça n’est pas franchement approprié et top crédibilité pour un groupe noise-rock qui veut impressionner dans les chaumières. Mais les trois membres de Mamma Pappa Barn ne sont pas de première jeunesse, connaissent tous les joies de la paternité, sont bien établis dans la vie professionnelle (architecte, pharmacien, designer), sont sans doute les heureux possesseurs de magnifiques chats et chiens alors ils ont autre chose à foutre que de jouer aux gros durs ou les torturés de service et passer pour ceux qu’ils ne sont pas. En plus, Mamma Pappa Barn n’est pas leur premier projet. Deux des membres (le bassiste Mathias Rask-Andersen et le guitariste-chanteur Viktor Ahnfelt) ont joué dans Quagmire, un groupe largement passé inaperçu tout comme Kevlar, The Ghoulies, Shellfire, Legbiter ou Culkin qui n’ont pas eu plus de réussite. Le trio sait comment ça se passe, ne tire plus depuis longtemps des plans sur la comète du rock, ont mis les illusions dans le garage où ils continuent d’occuper leurs week-end en faisant un peu de bruit. Et ils auraient tort de s’en priver. Utan Förvarning est plus qu’une simple récréation de quarantenaires en goguette. C’est du travail de nobles artisans et ce qu’ils ont fait de meilleur jusque là dans leur carrière musicale. Si la base est noise-rock, anguleuse, rythmique avec de nombreux passages basse-batterie, le trio le fait à sa façon, renforcé par un chant en suédois donnant une coloration singulière. Et la surprenante apparition d’une trompette sur Allt qui aurait presque un arrière-goût de trop peu. Un noise-rock qui a également la particularité d’être souple et aérien, même dans ses élans les plus virulents. Mamma Pappa Barn appuie ses coups juste ce qu’il faut avec un maximum de dextérité, aussi frondeur qu’agile et sans jamais chercher à en faire des tonnes, contrôlant sa véhémence, soignant les ambiances. Cela donne des titres courts dont l’accroche va grandissante au fil des écoutes, ne négligeant jamais une certaine aisance mélodique naturelle. Et quand le trio tente de prolonger le plaisir, c’est au profit d’une froide mélancolie s’installant subrepticement en arrière-plan, avec des accès répétitifs franchement addictif comme les six minutes de Kana Noll, ultime titre en guise de sortie très réussie. C’est à l’image de ce deuxième album inspiré (vous pouvez d’ailleurs écouter leur premier album Dåliga Nyheter en toute confiance) ne souffrant d’aucun temps faible et qui mérite beaucoup mieux que la confidentialité qui lui est réservé par ce maudit destin.

SKX (10/06/2019)