thesomnambulist
slowing


The Somnambulist
Quantum Porn - CD
Slowing records 2017

The Somnambulist a été en sommeil pendant cinq ans mais c'est un retour avec un album dense chargé jusqu'à la gueule. Seize titres, soixante-dix minutes. The Somnambulist n'a pas chômé. Le groupe toujours établi à Berlin revient également avec pas mal de changements au compteur. Marco Biancardi, l'italien expatrié et tête pensante de The Somnambulist, est le seul rescapé de Sophia Verloren. Si on retrouve encore ces anciens acolytes comme Rafael Bord sur Quantum Porn, c'est seulement au rayon invités. Thomas Kolarczyk (basse) et Luca Andriola qui s'est fait remplacer depuis l'enregistrement datant de 2015 par Valentin Schuster à la batterie sont les deux nouveaux membres du groupe. The Somnambulist a resseré les rangs en trio rock plus classique. Il est toujours possible de trouver des traces de violon, de piano et autres instruments bigarrés mais le guitare-basse-batterie domine.
Ce qui n'empêche nullement The Somnambulist de faire un disque partant dans de nombreuses directions. Avec un titre comme Quantum Porn, il ne fallait pas s'étonner. La physique quantique et la pornographie, même si je soupçonne quelques binocleux à blouses blanches de s'adonner à des heures supplémentaires devant l'écran pour astiquer leur pipette, il y aurait comme une incompatibilité. A moins de comprendre la pornographie quantique comme synonyme d'un album autant intellectuel que charnel, la possibilité de s'offrir une liberté musicale totale, jouir sans limite sans faire n'importe quoi, la raison et le plaisir et s'aventurer sur de nouvelles voies avec un groupe sans cesse en évolution.

Un disque divisé en quatre parties qui auraient pu correspondre aux quatre faces d'un vinyle qui n'existe (pour l'instant ?) qu'en CD. Pi, Epsilon, Phi et Upsilon. Quatre parties à chaque fois mais pas quatre univers différents pour autant. The Somnambulist brouille les pistes sans pour autant perdre son sens aiguisé de la composition. Les trois titres (Transverberate, Deeply Unutterable & Unimpressed et Unbegotten) qui avaient été érigés en single ne l'ont pas été par hasard. The Unmanned Song aurait pu être ajouté et vous aviez là une face Pi parfaite. The Somnambulist se dévoile volontairement plus pugnace, mélodique toujours, les riffs font des merveilles, la rythmique est entrainante ou bagarreuse et le chant rocailleux de Biancardi capable de partir dans de belles envolées continue d'être particulièrement séduisant. The Unmanned Song est quant à lui plus calme, long et mélancolique. Il est surtout superbe comme The Somnambulist a su si souvent parsemé ces disques précédents avec des morceaux profondément prenants.
Quantum Porn, ce sont aussi des compos aux tonalités inattendues. C'est le début de la face Espilon avec le cinématographique The Grand Anthem of the Unnoble Nation Of… qui nous rappelle que The Somnambulist a composé la musique d'un film en 2014. Le trio enchaine avec Goddamnland. Le trio sort les cuivres, se fait funky à la Talking Heads, joyeux et bien que ce soit tordu sur les bords, l'effet est surprenant, plus amusant que convaincant même si le morceau termine mieux qu'il a débuté. Idem pour Resume Where God Has Stopped et The Slowing Clock. On sent que le groupe a voulu se faire plaisir, se lâche, triture des samples qui deviennent un instrument à part entière, la basse est en avant et The Somnambulist dévoile un groove qu'il avait bien caché jusque là.
Et Quantum Porn continue de se mouvoir dans le dédale sonore d'une ambition nouvelle avec des morceaux plus alambiqués et contrastés. Les magnifiques huit minutes de Sundrum Ln commencent comme Vingt mille lieues sous les mers avant de dériver vers une rêverie allant dans le crescendo de l'intensité et le poignant. A Ten Thousand Miles Long Suicide Note et The Science Of Hidden Purposes aux pourtours psychédéliques sont également deux belles pièces maîtresses de ce troisième album.

Toutes les nuances de Quantum Porn pourraient continuer à être détaillées, chaque morceau vu un par un, la palette des sentiments engendrés par les morceaux étant large. Cependant, il existe comme un fil conducteur à Quantum Porn, une approche plus rock et tendu formant une ossature solide avec d'autres excellents titres comme Ronald Stark. En dépit de quelques flottements dont on ne leur tiendra pas rigueur vu la durée du disque, Quantum Porn montre que The Somnambulist n'a rien perdu de son charisme et de son talent de compositeurs hors-pair pour une musique embrassant de nombreux courants musicaux tout en se révélant unique.

SKX (02/06/2017)