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Pissed Jeans
Why Love Now – LP
Sub Pop 2017

L’année 2017 s’annonce monstrueuse en matière de sorties noise-rock (Stnnng, Hawks, Buildings, Baxter Stockman, etc...), pas le temps de dire ouf ! Un véritable marathon dédié au bruit de haute voltige. Certes, c’est entendu, tout ceci est enthousiasmant, mais lorsque les Pissed Jeans (la crème de la crème selon moi, et Dieu sait que j’ai toujours raison) sortent un nouveau LP, là c’est carrément la fête du siècle, la grand-messe. C’est bien simple, la terre peut s’arrêter de tourner ! Et si je devais vous conter ma rencontre avec le dernier Pissed Jeans sous forme d’une jolie histoire pour grands enfants, je procéderais comme suit.
C’était peu de temps avant la sortie du disque, une belle journée d’hiver étonnement lumineuse. Piaffant d’impatience à l’idée de me rendre à la fête qui avait lieu le soir même, je m’étais mis sur mon 31 très tôt dans l’après-midi : seau de fange plein à ras bord, tessons de bouteilles, barbe négligée… L’anti-classe à son summum. Après avoir tué les quelques heures restantes qui me séparaient de la réception des losers magnifiques en me rejouant mes vieux disques crachotants de Black Flag, Kilslug, Big’N, Jesus Lizard et toute la clique, mon index allait enfin presser la sonnette de la porte d’entrée. Le cœur battant la chamade, c’est finalement Miss Sub Pop qui m’accueille. Elle n’avait pas trop changé physiquement, mais quelque chose dans son attitude clochait. Cette façon pénible qu’elle avait soudainement de s’esclaffer tous les deux mots et ce dandinement de fesses un peu trop prononcé pour être honnête. Sur son cul justement, une inscription, d’un goût discutable, en strass : The Bar is Low. Bref, passé cette mise en bouche surprenante, la Miss me mène au salon. Nouveau choc ! En lieu et place du saccage habituel, une tablée de quarantenaires discutant plans épargne, joie d’avoir des gamins, vie de couple, projets de construction et art contemporain. Je peine à reconnaître les gus des Pissed Jeans dans ce décorum déprimant de bobos prisonniers dans un appartement témoin. La sono diffuse en boucle un morceau un peu pop sur les bords; leur nouveau morceau. Et Matt de lâcher à l’assemblée de binoclards que c’est le meilleur truc qu’ils aient jamais composé. A la première écoute, je l’ai trouvé tellement merdique, que j’en aurais bouffé les tessons planqués dans mon sac. La sentence est brutale. Fini le bon vieux temps, ce soir ce sera apéro sans alcool + jeux de société et discussions rasoirs. Je ferme ma gueule. Je note que les boys me jettent régulièrement des regards en coin, et visiblement ils se foutent de ma fiole. Empaffés !
Subitement la lumière s’est éteinte. Chaos indicible. J’entends des bris de verre, des meubles qui valdinguent, des éclats de rire, et surtout un morceau mortel de sludge-punk. Tuerie intersidérale. Projecteurs ! L’appartement témoin n’est plus, le miracle s’intitule Ignorecam. Malgré une approché légèrement plus sophistiquée, le nouveau Pissed Jeans est excellent et surprend par sa variété. Waiting On My Horrible Warning qui ouvre le bal nous ramène aux moments les moins rassurants de Beasts Of Bourbon tandis que le lassant The Bar Is Low décontenance quant à lui en proposant un titre digne de The Hives (en mieux). Que les fans du groupe se rassurent cependant, à l’exception de ce dernier et du dispensable Love Without Emotion, le reste de l’album s’inscrit dans ce que les Pissed Jeans font de mieux, à savoir leur décoction unique de sludge noise/punk. J’en veux pour témoin l’intégralité de la deuxième face qui frôle la perfection. Pas leur meilleur crû en raison des quelques fautes de goût invoquées et de l’absence du quota attendu de morceaux immédiats, mais de l’excellence tout de même.

Vincent/LNO (12/03/2017)