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Phoenician Drive
Two Coins – 10''
Exag'/Stolen Body/Rockerill records 2017

Phoenician Drive, c'est une route toute tracée – et cela n'avait rien d'évident – entre le nord de l'Europe et les cités antiques de la Phénicie, entre l'occident et l'orient, entre la tradition et l'expérimentation. Six musiciens rassemblés sous l'initiative du chilien Diego Moscovo à Bruxelles la cosmopolite. Il a amené ses percussions orientales (riqq, darbouka). Les cinq autres ont débarqué avec banjo, oud, guitare, basse et que sais-je encore parce que le groupe est aussi capable de pimenter le propos avec des cuivres et autres invités de passage. Et une batterie aussi car on n'est jamais de trop quand il s'agit de faire danser les foules. Car si ce beau dix pouces rouge se place sous le signe évident du mélange, de la rencontre entre des courants musicaux très différents, il s'agit avant tout d'un disque de transe.
Two Coins présente deux longues compositions (Two Coins For The Boatman et Fat Bill) tournant autour des dix minutes chacune et recherche l'hypnose, vous perdre, vous inviter à l'abandon. Phoenician Drive est un merveilleux guide, vous êtes entre de bonnes mains, laisser vous aller, tout va bien se passer. Il n'est pas question de world music qui s'encanaille, d'euphorie béate ethno-expérimentale divertissante. C'est une musique de derviches tourneurs, mélodies orientales, polyrythmie brûlante, psychédélisme fumant et grésillant élaborant des flèches prenant de la hauteur et de l'épaisseur au fur et à mesure qu'elles s'éloignent des lourdeurs terrestres.
Dans la démarche, Phoenician Drive rappelle L'Enfance Rouge de Trapani Halq Al Waady avec ce choc des cultures sauf que le rock et la rage suintante sont ici moins au centre des débats. Le sextet joue aux charmeurs de serpent, fait tournoyer la mélodie, s'enlace autour des rythmes qui s'entrechoquent avec suffisamment de force, de frénésie, de tension, de bruits grouillants pour contenter tout le monde et vous emmener dans leur infernale sarabande. Phoenician Drive n'est pas non plus un groupe instrumental même si les chants ne sont pas fondamentaux. Ils participent comme les autres instruments à ce sentiment d’envoûtement général, s'insinuent dans le moindre espace, un voile onirique, une illusion sonore descendant d'un minaret fantôme, les rythmes prennent feu et le serpent finit par cracher son doux venin pour l'emballement final et irrésistible de Fat Bill. Une transe parfaitement construite et maîtrisée de bout en bout, dépaysement garanti. Les distances n'ont jamais paru aussi courtes entre ces différents mondes, physiques ou non. Cocher le nom de Phoenician Drive sur votre carte.

SKX (20/12/2017)