golddime
firetalk


Gold Dime
Nerves – LP
Firetalk records 2017


Talk Normal nous avait lâchement abandonné à notre triste sort en 2012 après le somptueux Sunshine. La moitié du duo féminin new-yorkais revient par l'intermédiaire de sa batteuse, Andrya Ambro, sous le nom de Gold Dime qui était le nom d'un morceau (pas terrible) figurant sur un split 7'' avec Thurston Moore. L'esprit de Talk Normal n'est donc pas totalement mort, on s'en réjouit. Les passerelles entre les deux projets sont nombreuses, la filiation naturelle comme l'évolution, corde déroulée emmenant Gold Dime dans une sphère encore plus troublante et unique.
Andrya Ambro est la tête pensante de Gold Dime dans lequel elle chante, joue de la batterie, s'escrime derrière la guitare, le piano et divers bruits mais elle n'est pas entièrement seule. Adam Markiewicz (basse, violon, chant), Lazar Bozic (The Sediment Club) à la guitare, Kate Mohanty (saxophone sur Easy) et Seth Colon (saxo sur 4 Hours) lui donnent un coup de main sans oublier son ancienne comparse dans Talk Normal, Sarah Register, qui a masterisé l'album.
Pour autant, Nerves n'est pas un album luxuriant regorgeant d'une instrumentation riche faisant feu de tout bois. Le caractère décharné et intimiste de Talk Normal continue de flotter dans l'air comme un lourd présage. Le chant tempétueux de Andrya Ambro n'est pas là pour vous la raconter facile contrairement à ce que laisse penser les huit minutes de Easy ouvrant l'album. Elle désarticule chaque syllabe, les déforme, les accentue soulignant ainsi que easy n'est pas la façon dont ça va se jouer cette fois-ci. Et si l'album s'appelle Nerves, ce n'est pas pour rien. La voix d'Ambro est une injonction promettant autant la douleur que l'urgence mais aussi la douceur. Le propos est lumineusement noir, écorché, provocant, à l'instar d'une Carla Bozulich. Avec une orchestration au minimum, Gold Dime ressort des morceaux âpres, tendus, sombres et beaux aussi. La batterie, l'instrument principal d'Ambro, n'est finalement pas au centre des ébats. Il s'agit plus de textures, d'arrangements, d'une guitare disloquée, du bourdonnement d'une basse aussi discrète qu'essentielle, d'un rythme minimaliste répétitif ou tribal sur une batterie débarrassée de tout superflu, de perturbations sonores, trouver un équilibre entre des composantes éparses pour délivrer des morceaux envoûtants, étrangement séduisants sur lesquels il est possible d'esquisser quelques pas de danse. Les mélodies se dévoilent au détour d'une ligne de saxophone et plus généralement par les (belles) intonations variées d'Ambro parfois contrebalancées par la voix de falsetto de Adam Markiewicz sur Disinterested ou autres complémentarités et chœurs se construisant, se croisant sur des compositions élaborées comme des histoires.
Gold Dime s'essaye également à la reprise avec All We Have To Be Thankful For de Anne Clark. Un morceau datant de 1982 sur The Sitting Room, premier album de l'artiste anglaise pionnière dans le spoken words et dont l'écho trouve une place adéquate plus de trente après chez Andrya Ambro pour un titre qu'elle personnalise largement en se permettant même d'y rajouter ses propres paroles. Talk Normal n'est apparemment pas fini, plutôt dans une sorte de longue pause. Cependant, Gold Dime n'est pas un projet annexe mais un véritable nouveau groupe dixit Andrya Ambro avec qui il va falloir également compter. Tant mieux.

SKX (25/10/2017)