feedtime
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feedtime
Gas - LP
In The Red 2017

feedtime est donc bien de retour. Après un single sur Sup Pop en 2015, ce sont d'autres fans du trio australien, le fameux label In The Red, qui passent à la vitesse supérieure avec la publication d'un nouvel album et quatorze inédits. Ça s'appelle Gas et pourtant, ça ne le sent pas. Ou alors si, à la manière de feedtime. Sans strictement rien changer. Sans se préoccuper des modes qui passent. Les deux pieds toujours dans la même merde qui ne plaira qu'à une poignée d'irréductibles. Pour tous les autres, feedtime continuera de sentir le gaz.

Vingt et un an après Billy sur Amphetamine Reptile, feedtime applique la formule minimaliste qui a fait sa gloire de cloportes. Tenir un riff qui sent la ferraille, le répéter, jouer sur l'intensité, l'accompagner d'une basse granuleuse sur un minimum de cordes et d'une batterie sans fioriture et obstinée. Et comme l'âge n'a pas adouci les cordes vocales de Rick (guitare) et Al (basse), la grêle continue de s'abattre sur le rock primaire et sauvage de feedtime. Tout est histoire d'énergie, de variations sur les tonalités, d'épaisseur, de grains, de subtils détails derrière l'acier rouillé dans cette musique autiste. Plus de vingt ans à dormir et feedtime n'a rien perdu de son savoir-faire. Comme si c'était hier. Il est bon parfois de constater que certaines choses ne changeront jamais.

Gas chauffe à blanc, se nourrit de sa propre combustion, laboure encore et toujours son propre lopin de terre ingrat. feedtime a la foi. La basse gronde, grommelle, vibre sous son propre poids alors que la guitare se met régulièrement en mode slide. La touche blues de la part d'un groupe qui a toujours aimé puisé dans les racines du delta pour polir l'âpreté de son attitude. Les morceaux sont brefs, rock à l'état brut. Dans tous les sens du terme. L'origine du rock, droit au but, ce vieil air connu qui titille les rotules repeint par une bande d'indécrottables forgerons aimant bourriner dans les côtes, des riffs ancestraux remis au goût du jour quand bien même la lumière du jour ne descendra jamais sur les épaules de feedtime.
Le trio assure donc comme aux premiers jours, délivre son lot de perles noires : Any Good Thing, Box n Burn à la dynamique plus originale, l'habité Hopeful Blues, le carnassier Fifty Eight, Sister qui te fera danser toute la nuit et Shovelhead parce que les moteurs qui vrombissent sont la quintessence de feedtime. Un album compact, sans temps mort, sans faiblesse, impeccable dans sa crasse cultissime. feedtime, toujours les rois du bitume, la bande-son idéale pour tracer des bornes et s'offrir une cure de jouvence via un groupe qui a pris cher mais qui la joue comme si de rien n'était et qui peut essuyer le nez à encore bien des morveux.
Et si le cœur vous en dit, vous pouvez prolonger le plaisir en lisant les travaux antérieurs.

SKX (02/05/2017)