faking
reptilian


Faking
Goddamn Cowards – CD
Reptilian records 2016

Alors comme ça, nous sommes des foutus lâches ?! Il faut entendre Jeff Bowne, le guitariste-chanteur de Faking, le gueuler avec une conviction inébranlable sur le titre d'ouverture We Are Goddamn Cowards pour en être aussitôt assuré. Avec une pointe de désespoir qui en fait tout le sel. Le trio de Philadelphie sort son premier album et il serait surtout lâche de ne pas l'écouter. Et tant pis si Faking est spécialiste en distribution de larges mandales et construction de murs d'acier, il s'agirait de ne pas se défiler devant tant de beauté brute et de savoir-faire noise-rock.
Après un single qui avait donné l'eau à la bouche, Faking confirme l'énorme potentiel de leur force de frappe. Faking part au combat, la baïonnette au fusil, conquérir des terres qui ont déjà été piétinées par de valeureux combattants. Le trio ne dépareillera pas au tableau d'honneur. Dans le sillage des Glazed Baby et autres mastodontes de la noise alliant lourdeur, vélocité et férocité, Faking se pose comme de fieffés prédateurs. Avec un détour vers Young Widows - le meilleur de Young Widows - pour le son de guitare surtout, comme épris de reverb, un écho lugubre avant l'assaut final.
Roulements de tambour sur une batterie aux dimensions plus large que la moyenne (très belle grosse caisse) pour impressionner l'ennemi. La basse est de taille normale mais ce qu'il en ressort est tout aussi pétrifiant. Un groupe noise sans assise rythmique qui assure est comme un politicien sans hypocrisie, il s'écrase lamentablement. Et la rythmique de Faking vaut tous les longs discours.
Mais derrière toute cette démonstration de force, ce qui fait la différence parmi tous les mécréants est la qualité intrinsèque des compos avec toutes les finesses qui s'y glissent. Entre deux cassures et trois crochets du droit, Faking brode des accords éclairés, distille un venin ardent et sombrement poignant, échafaude des structures en épingle méchamment épiques, des parties de guitare harmonieuses et accouche de dix titres qui font bloc tout en étant à chaque fois unique. Du grand art à l'instar de Beg & Pray qui met à genou le pauvre pêcheur que nous sommes, If I Were Your Woman, autant pour les paroles que la rage qui en découle ou Not Fine, bel exemple de folie latente irradiant ce disque derrière la mécanique qui semblait implacable. Faking n'est pas un monstre sans foi ni loi. Faking a des failles. Elles ne sont que bassement humaines, prêtent le flanc à toutes sortes de petites lâchetés quotidiennes mais elles peuvent aussi être très belles. Goddamn Cowards, un grand disque de noise-rock.

SKX (17/01/2017)