delacave
teenagemenopause


Delacave
If I Am Overthinking, Talk About Anthing, Any Damned Thing – LP
Teenage Menopause 2017

Trop penser, trop de questions, trop d'anxiété, ça te rend dingue alors comme dit France Gall, débranche. Sauf que c'est Delacave. Cerveau en ébullition, moral en décoction, le duo Lily Pourie Chansard et Seb Normal revient plus fort, se pointe à quatre. Un batteur (Quentin Scanner), un guitariste (Samir Cheb), ça ne change pas vraiment la donne puisque Seb Normal faisait déjà tout ça sur le premier album, à part pendant les concerts où une boite à rythmes prenait le relais d'un type qui n'a que deux bras. Il ne s'occupe plus que des claviers. Et des chœurs. Quant à Lily, elle continue la basse, le chant, les paroles, la pochette.

C'est donc le changement dans la continuité. Voir mettre un frein à l'immobilisme. Le gloomy wave de Delacave ne colle plus vraiment, la guitare prend plus de bruit, la batterie plus de place, Delacave emprunte le Chemin De La Honte, autre groupe avec Pourie et Normal tous les deux dans un même bateau mais ça reste Delacave, allez comprendre. Delacave a pris du coffre, s'encanaille, augmente le volume mais ça reste noir et bizarre. A l'arrivée, ce qui compte, ce n'est pas les additions, ce sont les chansons et elles n'ont pas goût de bouchon. Surtout tout le début. Ça commence au cordeau avec Overthinking, pris au vol, en pleine mesure et en plein délire d'une rythmique en frénésie. Les claviers conduisent la mélodie, le chant pose des larmes et Delacave semble embarqué dans une course folle dont l'issue ne peut que ressembler à un ravin. Une mise en bouche parfaite, le tapis déroulé vers des drames infinis du quotidien. I Can Do Nothing vient confirmer cette impression de compos plus fouillées, plus malaxées, l'aura froide et années 80 en arrière-toile toujours, le nerf en plus. Et le saxophone aussi d'un invité (David Chevallier). Guitare & claviers écrivent de nouvelles belles pages au répertoire de Delacave. Uniform With No Brain repointe son nez, revu et corrigé, lui qui avait déjà habillé le premier album et un single également. La nouvelle version s'accélère, possède encore plus un air de tube underground avec cette basse qui défonce tout dans un gant de velours et dont il est impossible de se lasser. The Path conclut en beauté la face A d'un groupe qui n'a plus peur de mettre en valeur les mélodies, de puiser des forces inédites depuis sa zone d'ombre et de confort et de s'envoler dans des limbes qui prennent de l'épaisseur et de l'éclat.

De l'autre coté du vinyle, le long Way Of Nothing ouvre la face comme les six minutes de Overthinking avait ouvert le disque. Mais plus question de course poursuite. Delacave plonge. Ou s'envole, je sais plus trop. Mais il ne reste pas sur terre, c'est certain. Un titre dans une troisième dimension, aussi vertigineux que plombant, soyeux que doucement dramatique dans sa procession aussi noire brillant et envoûtant qu'un titre de Girls Pissing On Girls Pissing. Après, je dois avouer que j'ai un peu décroché. L'ivresse des profondeurs dont il est difficile de se remettre avec quatre titres suivants ne provoquant pas engouement identique. Sans doute mal placés dans la liste, sûrement pas aussi pertinents (notamment Territory qui était la face B du single Uniform With No Brain et aussi Sleeping On The Floor, trop inconsistant). Rien de franchement embêtant, donne juste un goût d'inachevé à un disque parti tambour-battant. Mais il ne faut pas trop penser, trop analyser, juste se laisser porter par une version évolutive de Delacave qui est toujours un aussi bon cru.

SKX (03/04/2017)