congerconger
katatak
lollipopmusicstore


Conger ! Conger !
This Is A White Album - 2xLPs
Self-released/Katatak/Lollipop Music Store 2017

Encore un disque que je m’étais juré de chroniquer. Rapidement et facilement. Les doigts dans le nez. Et puis rien ne sortait, la page blanche. Ou plutôt (je crois que nous sommes en 2017 ou quelque part par là, non ?) un écran d’ordinateur vide, à peine perturbé par les défaillances d’une carte graphique vérolée par l’obsolescence programmée. Voilà : il ne faut jamais trop se faire de promesses inconsidérées, hein. Sauf que ce double album de Conger ! Conger ! tient toutes ses promesses, lui. Il ne se dérobe pas, il n’a pas peur, il dévoile au grand jour toute sa beauté (et seuls Dieu, Satan et quelques autres privilégiés savent pour l’instant que ce disque est infiniment beau et prenant), ses ténèbres, sa clarté, ses faiblesses, sa force, son amour, ses désillusions, ses espoirs, sa folie, sa sagesse, ses doutes, ses envies. Oui c’est cela : plus qu’un disque de vie(s), This Is A White Album est un disque en vie.

This Is A White Album : la référence du titre n’aura échappé à personne – ou alors c’est que tu es mort avant le 22 novembre 1968 – et pour en avoir discuté un jour avec le guitariste de Conger ! Conger !, grand fan devant l’éternel de l’un des plus grands groupes que le monde ait jamais connu et en particulier d’un certain double album blanc, ce titre me semble d’une parfaite évidence*. Tout comme le noir impénétrable et l’ironie salvatrice, peut-être, de la pochette : This Is A White Album c’est l’inventivité des 60’s (les Beatles, les Kinks bien sûr) alliée à la noirceur et le sarcasme des 70’s pourrissantes et des 80’s (Joy Division, Gang Of Four, The Fall). Tout ça et même encore beaucoup plus (le Gun Club par exemple) sur un double album, quatre faces, dix-huit titres. Vaste programme. Et pari largement tenu – bien que je doute fort que ce joyau ait au départ été concrètement et sciemment conçu comme un « pari » tant ici tout me semble aussi évident que humble, volontaire que discret, flamboyant qu’intime. OK : peut être qu’avec le temps ce disque en est devenu un, de pari. Comme lorsqu’on s’arrête un tout petit instant, que l’on ose un regard en arrière et que l’on décide que le plus important c’est de regarder devant. La vie, encore.

Vous l’aurez compris, This Is A White Album fait déjà partie des albums qui ne me quittent pas. Qui m’obsèdent mais, et c’est vraiment rare, qui m’apprennent constamment quelque chose. Quoi ? Je ne le sais pas trop, je le ressens et c’est tout. Et j’ai ce même ressenti à chaque fois que j’écoute ce double LP en pente, une pente à la fois descendante et ascendante : du très post punk Shortterms à l’infiniment poignant A Place, This Is A White Album parcourt à toutes jambes la diagonale de la folie et du fracas pour atterrir du côté de quelque chose de plus méditatif et de plus ténébreux. Mais toujours avec la même envie, la même énergie. Les trois Conger ! Conger ! ne lâchent rien, absolument rien du tout, et au contraire, l’écoute du disque devient de plus en plus passionnée. J’ai rarement eu affaire à un disque avec un tracklisting – apparemment si simple et évident – aussi intelligent et définitivement naturel. La vie toujours.

Hazam (22/04/2017)

* mais ce n’est pas la seule référence aux Beatles que l’on trouve sur This Is A White Album…