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Michel Anoia
Plethora – LP
Abekeit/Allende/Eardrum Terrorism/ Ezkaramuza/Skullhouse/ Smitfoodgroup/Underground Pollution/Wooaaargh records 2016

Les quelques lectrices et lecteurs assidus de ce ouebzine perdu au beau milieu de l’univers numérique et multi-connecté savent bien que par ici – le patron qui fait toujours ce qu’il veut tout comme son larbin qui fout pas grand-chose – on n’aime pas trop la musique d’enfileurs de perles et de tricoteurs de cottes de mailles, le metal fusionnel, l’amour en 3D, les tartes aux fruits de mer et les progueries narcissiques. Et il n’y a aucune exception à ça. Ou presque… Michel Anoia n’en est toutefois pas tout à fait une puisque ce groupe de Lyon, s’il passe son temps à lorgner vers ces machins là et s’en nourrir allègrement, mastique avec bonheur tout ce qui semble lui passer par la tête et redégueule voluptueusement le résultat sous la forme d’un ectoplasme maléfique aussi repoussant que jubilatoire, aussi efficace que drôle et aussi incisif que teigneux.

Les détenteurs de la Loi Ancestrale du Metal prendront plaisir à rappeler que Michel Anoia suit sans vergogne les traces d’un Cephalic Carnage pour le côté barré/fou-fou/j’aime copuler avec les tentacules d’un calamar géant mais, précisément, Cephalic Carnage a toujours été un groupe atypique, moqueur et complètement débile, exactement ce à quoi peut également prétendre Michel Anoia. J’ai toujours voué une certaine admiration aux musiciens et aux groupes qui ne s’enferment pas doctement dans leur musique, assument leurs choix et leurs influences mais vont au delà de la ligne d’horizon de leurs guitares à sept cordes (les guitares et les basses avec une corde en plus, surtout lorsqu’elles sont jouées avec tous les doigts, ça me traumatise au moins autant que la première fois où j’ai entendu une voix trafiquée au vocoder, c’est tout dire). Avec Plethora, Michel Anoia fait donc preuve d’une inventivité semble t-il sans bornes et il n’y a pas besoin de gratter très longtemps à la surface de ce disque pour s’apercevoir que la folie contagieuse déployée ici avec bonheur est le fait d’une bande de sales gosses qui maitrisent très bien leurs instruments et leur sujet mais en profitent d’abord pour s’amuser, se vautrer dans la boue, faire des food fights, raconter des blagues intégralement traduisibles en langage des sourds et muets, foncer tête baissée dans les plus inextricables labyrinthes qui soient et en ressortir plus magnifiques que jamais, le sourire aux lèvres et les neurones – du moins ce qu’il en reste – en fusion.

Enregistré très scientifiquement avec la batterie et la basse d’un côté, la guitare d’un autre et la voix je ne sais pas trop où, c’est à dire suivant une méthodologie à peu de chose près à l’opposé de ce que pourraient faire des punks bas du front possédant tout juste deux micros et un quatre pistes, mixé dans la douleur mais palpitant comme une machine infernale bricolée et rafistolée au goudon, Plethora sonne bizarrement – en tous les cas pour un disque de metal extrême au sens large – et possède une fraîcheur et un côté instantané qui, justement, tiennent de la provocation. Nos oreilles passent alors inévitablement un très mauvais quart d’heure mais on aime ça, tout comme on raffole des coq-à-l’ânes impromptus, des grinderies foudroyantes, des riffs brutal death en forme de séismes de magnitude neuf, des shreds même pas honteusement piqués à Krallice et des turlututus jazzy vas-y que je te pousse. Il n’y a que le chant – en forme d’aboiements d’ostrogoths – qui se révèle plutôt classique, contrepoint assez saisissant à une imagination débridée qu’il met parfaitement en valeur.

Hazam (09/05/2016)