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Teho Teardo & Blixa Bargeld
Still Smiling - 2xLPs
Spècula 2013

Le genre de disque qui vous prend par surprise. D'un coté Blixa Bargeld, ancienne gloire de Einsturzende Neubauten, des Bad Seeds et dont le meilleur semble derrière lui. De l'autre, Teho Teardo, ancien membre de Meathead dans les 90's, groupe industriel bâtard qui s'était fait connaitre des rockers par une série de split singles avec Cop Shoot Cop, Pain Teens, Zeni Geva, Babyland ou Bewitched, dont on préfère oublier tout le reste de la discographie et qui s'est lancé depuis dans la musique de films. Une collaboration qui ne donnait pas envie et d'ailleurs, la première écoute était loin d'être concluante.
Mais il en n'a pas fallu beaucoup plus pour se faire happer. Éblouir par tant de classe. Bercer par tant de subtilités. Transporter dans un univers singulier. Mélange de musique électronique et d'instruments à cordes (le Balanescu Quartet ou la violoncelliste Martina Bertoni dans la case collaborateurs), de technologie et d'organique, Teardo a réussi à mettre ses expériences sonores au service de véritables chansons sur lesquelles vibre le timbre grave et profond de Bargeld. Les ordinateurs s'effacent derrière les mélodies éclatantes, les arrangements sont d'une grande finesse, les silences et les murmures sont aussi importants que la sombre grandeur de certains morceaux. L'expérimental Axolotl qui n'est pas sans rappeler le meilleur de Neubauten se transforme en une superbe compo solennelle qui prend aux tripes avec les cris aigus tout en retenue de Bargeld. D'ailleurs c'est tout son chant, puissamment sobre, quasi parlé, en allemand, anglais ou italien de Bargeld qui vous file le frisson dans une performance vocale de haute volée. Jusqu'à jouer le crooner de l'impossible sur Alone With The Moon, une reprise de The Tiger Lilies. Le refrain de Come up and See Me vous reste dans la tête pendant des jours alors que j'en suis à je ne sais pas combien d'écoutes du seul morceau What If...? avec sa mélodie à faire chialer les plus rustres et quasi seul morceau avec du rythme pratiquement absent par ailleurs. Mais pas l'intensité et une beauté indéfinissable, quelquechose de limpide et de sophistiqué en même temps, une expression de gravité impressionnante et une présence aérienne et poétique. Des morceaux avec ses violons qui ont plus à voir avec de la musique de chambre, dépouillés, fragiles mais d'où se dégagent une grande force confrontés qu'ils sont aux sonorités expérimentales, les guitares électriques, la basse ou le piano joués par Teardo et Bargeld. Chaque titre a sa propre identité, son originalité, ça crame, ça tressaillit, décalage avec le temps, dans une autre dimension. Magnifique et inattendu.

SKX (11/01/2014)