herod
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Herod
They Were None – CD
Mighty Music 2014

Herod annonce tout de suite la couleur en plaçant son titre le plus long en première position. Presque dix minutes d'entrée de jeu et The Fall est son nom. Et effectivement, plus dure sera la chute. Une plongée abyssale, aucun espoir de retrouver le chemin de la lumière au bout du tunnel que constituent les cinquante-quatre minutes de They Were None.
Herod s'inscrit dans la longue lignée des groupes suisses, les Vuyvr, Coilguns, Cortez et les aînés Knut pour ne citer qu'eux, chacun apportant sa pierre et ses nuances à un édifice metal/post-hardcore des plus impressionnants. Herod, c'est la tendance Breach, la tendance je navigue à la frontière de différents styles, louvoyant entre metal, heavy noise-rock, post-hardcore pour accoucher d'une monstrueuse suite de morceaux dont chaque étape est un pas de plus dans un gouffre sans fond.
Un album à gestation lente. Un chef de projet, Pierre Carroz, qui a commencé à écrire à la guitare les premières ébauches de cet album en 2006, dans la torpeur d'un exil suédois, avant de peu à peu rassembler des forces suisses (David Glassey pour le chant, Fabien Vodoz pour la batterie et Bertrand Pot, second guitariste pour la scène) à la faveur d'un retour en 2011 dans le pays natal et de mettre en boite des années de frustration et de noirceur. Et Herod a tout mis. C'est sans doute là son principal défaut. Ne pas avoir fait le tri et proposer un album trop long, trop étouffant sur la longueur, la fureur se diluant dans le dédale des onze titres d'un album qui aurait dû être écourté de trois ou quatre morceaux. Trop de torture mentale qui vous détourne du droit chemin, celui qui avait pourtant magnifiquement débuté avec The Fall, prolongé par les rafales de batterie de Inner Peace, repris ses esprits dans le plombant mais néanmoins atmosphérique Sad Hill Part 1. La machine reste quand même saisissante. Le chant varie à bon escient les effets là où trop de groupes du genre se contentent de beugler comme des ânes et sans discernement. L'architecture Herod construit des ponts sous lesquels coulent une pression sans cesse grandissante, des mises en abîme vous plongeant la tête sous l'eau et très peu de moyens pour s'en sortir. Le lyrisme reste sobre, le point de rupture jamais loin, Herod sachant toujours rattraper son auditeur par un riff ou une bastonnade rythmique plus fiévreuse alors que la routine guettait. Le texte de l'écrivain russe Mikhail Boulgakov lu avec intensité par Nataliia Ulyanova sur l'avant dernier titre No Forgiveness for Vultures permet d'ailleurs de redonner un peu d'élan à un album qui finissait par se répéter – toujours le syndrome de l'album qui n'en finit pas – mais They Were None place Herod parmi les groupes dont on surveillera attentivement les prochaines productions.

SKX (21/11/2014)