Vous en avez soupé des duos ? De ces affreux couples guitare-batterie qui font rien qu'à tous se mordre la queue ? Biscuit Mouth est donc pour vous. Parce que déjà Biscuit Mouth n'est pas instrumental, ça chante et plutôt bien. Pas de complexité ou d'étiquette math-rock à la noix. Et parce que la guitare n'est pas vraiment une guitare. Ce n'est pas une basse non plus, un instrument à trois cordes, les plus graves en bas, un objet hybride fabriqué maison entre la guitare et la basse que Biscuit Mouth appelle Buitar. Ça donne des perspectives nouvelles comme si le duo anglais se faisait passer pour un trio avec un son à cheval entre plusieurs sonorités qui ont le gros avantage d'être toutes superbes. Récemment vu en concert près de Rennes à la Fermatozoïde, longère au milieu des champs mais pas loin d'un agent de sécurité (pas de chance !), Biscuit Mouth a mis tout le monde d'accord, leurs compositions éclatant au grand jour bien plus fort et plus haut que sur un merdique bandcamp. Et comme ils sont de très gentils garçons, ils fournissent cassette et CD. Des tirages limités pour une tournée sillonnant encore les routes françaises en ce moment précis où je tape ces lignes. Alors n'hésitez pas à aller les voir. Foncez même.
Hybride, la musique l'est aussi. De prime abord, ça l'air d'un groupe noise-rock assez classique, des articulations rythmiques sèches, carrées, anguleuses comme il en existe pas mal du coté de Chicago et son cortège de groupes noise-rock avant qu'un feeling aussi curieux qu'attirant ressemblant à un sale blues-punk-garage hululant ne vienne hanter les structures.
Le résultat est bluffant, sur les huit titres de la cassette et encore plus sur les neufs du CD-R. Grand talent de compositeurs qui fait toute la différence, trouvailles à tous les étages et accroches subtiles pour tous les morceaux, syndrome rock'n'roll dans un alliage aussi bien basique que sinueux et tout en souplesse. Le guitariste/bassiste (le buitariste ?) développe des trésors d’ingéniosité, des riffs mélodiques ou percutants et son entente avec le batteur forme un couple à l'énergie communicative et cinglante. Les tubes s’enchaînent à la pelle comme Hey Pinko sur la cassette ou Roll Into The Dancer sur le CD qui vous donnera envie tour à tour de courir la nuit et danser le twist. Biscuit Mouth offre une balance parfaite entre les moments de baston et les nombreuses respirations, les passages ultra efficaces, redoutables et les tensions exacerbées quand Biscuit Mouth louvoie, guette sa proie, joue avec et fait naître des émotions qu'on était pas prêt d'imaginer de la part de ce genre de groupe. Et pour couronner le tout, il fallait une voix à la hauteur des instruments et le batteur assure comme un chef. Nombreux sont les morceaux où seule la voix accompagne la buitar et elle prend de la place cette voix, comme légèrement saturée, nasillarde, extrêmement convaincante et charismatique. Biscuit Mouth est donc un jeune groupe affichant plus que de belles promesses. Ne reste plus qu'à espérer qu'une sortie digne de ce nom sur un vinyle pour le sortir de la confidentialité, encore plus de tournées et Biscuit Mouth sera dans toutes les bouches.

SKX (30/06/2014)