arabrot
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Arabrot
Arabrot – LP
Fysisk Format 2013

J'avoue que si je devais refaire la chronique de Solar Anus, elle serait un bémol en-dessous de ce qui avait été écrit deux ans plus tôt. Le cap des écoutes répétées n'a pas été franchi allègrement. Et au moment d'aborder ce sixième album des Norvégiens de Arabrot, c'est l'effet inverse qui tend à se produire. Les premières écoutes ne m'emballaient pas plus que ça, ne sachant pas trop quoi en penser avant que l'intérêt porté à cet album sobrement intitulé Arabrot ne suive une trajectoire plus positive. Pour carrément se révéler très convaincant.
Arabrot a retrouvé du nerf et du muscle. Non pas que l'album précédent était mou du genou mais au final, il a du mal à tenir la distance et n'est finalement pas épargner par un surpoids de gras. La tête pensante du groupe et seul maître à bord, le guitariste/chanteur Kjetil Nernes, a composé les dix titres isolé (avec sa copine, faut pas déconner non plus) dans une vieille église désacralisée en rase campagne à la frontière suédoise, loin d'Oslo et de son agitation. On peut avancer que la solitude de l'artiste a du bon sur l'inspiration. Il a su également s'entourer d'une nouvelle équipe (qui lui avait cependant déjà donné un coup de main sur les disques précédents) et recréer le triangle à trois qui sied à la perfection à l'agression noise-rock dont Arabrot est coutumier. Un bassiste à temps plein en la présence de Emil Nikolaisen (du groupe Serena Maneesh sur 4AD) qui s'est aussi occupé de l'enregistrement et des choeurs. Pour la batterie, plusieurs invités dont Erland Dahlen, lui qui est plus habitué à jouer dans les projets jazz/expérimentaux. Et Lasse Marhaug aussi pour un surplus de bruit. Une nouvelle formule pour un nouveau départ d'où le nom de l'album, comme si c'était un recommencement et un premier album.
Et il est vrai que cet album est plus direct. Pas de longs titres tortueux mais une approche rock'n'roll comme ce qu'Arabrot pratiquait au début. Un sacrifice diabolique sur l'autel d'un noise-rock sanguinolent et coloré au metal, ténébreux avec des pointes lyriques. Le dépeçage avec les dents, des riffs carnassiers, le chant si particulier de Nernes mais aussi plus varié, presque chanté et mélodique parfois du haut de la virilité de ses cordes vocales. Les six premiers titres défilent, matraquent, frappent avec discernement, avec la collaboration de Laura Pleasants (Kylesa) au chant sur Arrabal's Dream et la rugosité d'un animal blessé qui a toute la liberté pour expurger sa rage. Et pour les quatre dernières compos, l'intensité monte d'un cran. Lasse Marhaug sort les triturations sonores sur des compos qui n'attendaient que ça tellement ça leur va bien. Un amas de grésillements et de saturations zébrées tombent sur The Horns of the Devil Grow (ainsi qu'une putain de montée rythmique et la sensation d'un chaos imminent soutenu par des choeurs chevaleresques) ou sur The Bitter Tears of Könt, l'harmonium pointe son hululement funeste sur Mænads et Arabrot balaie avec force les doutes nés d'un Solar Anus plus convenu grâce à une créativité retrouvée.
Arabrot est toujours ce monstre indomptable et hybride qui n'a pas fini de mettre le feu aux campagnes noise-rock et metal du troisième type.

SKX (17/12/2013)