jealousymountainduo
blunoise


Jealousy Mountain Duo
N°_02 - LP
Blunoise 2012

Quand le petit mot qui accompagnait l'envoi promo indiquait "avec le batteur de Nicoffeine", le premier réflexe a été de mettre mon casque anti-bruit avant de déposer l'imposante galette de 180 grammes sur la platine. La mémoire auditive se rappelait encore des séquelles provoquées par l'écoute de Lighthealer Stalking Flashplayer. Je ne me ferais pas avoir deux fois. Heureusement, le département de la santé publique n'aura pas à monter une nouvelle fois au créneau de la protection des masses laborieuses et chancelantes. Jealousy Mountain Duo est un... duo qui fait du bruit, certes mais pas au même niveau. Leur credo, le bruit libéré des contraintes terrestres mais sans faire le grand huit du n'importe quoi. Et sans le volume à fond. La batterie crépite, la guitare dessine des boucles et même pas peur. Des effluves free-noise de Storm and Stress, cette (fausse) impression d'improvisation sur des compos qui doivent sûrement contenir leurs parts d'impromptu mais dans un cadre construit, des échappées free-jazz et surtout un agréable sentiment de fluidité et de légèreté.
Enregistré sur un 24 track tapemachine, sans overdubs, avec un vieux kit de batterie jazz et de très bons micros, dixit le groupe allemand, le rendu de ce deuxième album met le chaos en poésie. On connaît la force de frappe de Jörg A. Schneider, sa capacité à saccager une pauvre batterie. Il est doué aussi pour la subtilité, pour les trépidations agissant par vagues, jouant sur la dynamique, variant l'intensité, donnant parfois l'impression d'en foutre partout avant de se réfréner et de faire preuve d'une incroyable créativité. A la guitare, Jens Berger n'est pas du genre à faire la démonstration d'une technique virevoltante et d'une utilisation éhontée d'un rack d'effets qui serait large comme un terrain de football. Dans sa pédale loop, il met en avant son cœur plutôt que des doigts tentaculaires s'escrimant sur des boucles stériles. Il glisse ainsi des paquets de bouts de mélodies superbes faisant décoller la musique du duo vers d'autres sphères que l'énième groupe math-rock instrumental bruitiste. Les parties de guitares s'imbriquent harmonieusement, tour à tour erratiques ou divaguant tranquillement, retombant toujours sur ses pattes. Les textures sont riches, les sonorités sont surprenantes (Dallas Summer Song) et les notes font rêver. On croirait même parfois entendre comme une trompette (la fin de Bergneider) ou un violon sur Latino Heaven, compo superbe sur laquelle on est pas loin de la lévitation au même titre que le final Don't Ask me about Dresden. Sur un tapis de rythmes nerveux et inventifs, ce guitariste est pour beaucoup dans la finesse et le plaisir grandissant d'un album révélant tous ces trésors au fil des écoutes. A l'instar de la pochette, recto et verso, la musique de Jealousy Mountain Duo est chaleureuse et troublante. Laissez vous faire…

SKX (16/10/2012)