calva
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Calva
Sacrifice - LP+CD
A Tant Rêver Du Roi 2012

J'ai bien fait d'attendre le concert de Calva à Rennes le 11 mai dernier. Un concert, ça sert souvent de révélateur, d'élément déclencheur. Le plus beau souvenir en la matière reste sans doute un concert de Neurosis au Confort Moderne à Poitiers, ça devait être en 1993. Je n'ai jamais plus écouté ensuite Souls at Zero de la même façon, tout était différent, j'étais l'ennemi du soleil et je rêvais de courir nu dans les champs de blé quand la lune brillait à son paroxysme.
Bon ok, avec Calva, on est loin de tout ça, de la saisissante puissance d'évocation d'une telle image. N'empêche, alors que je retournais le vinyle jaune de Sacrifice dans tous les sens depuis un bon mois, le concert du trio de Pau a été un coup de bol, une opportunité pour prendre la mesure et la température de Calva, pour que leur musique prenne sens dans les petites cases agitées de ma boite crânienne. Pour comprendre que la musique de Calva est capable d'être rentre-dedans et saignante. Les riffs sur Dolcetto explosent, les guitares explosent, les structures explosent régulièrement. Le jeu du batteur extrêmement précis, dynamique, ne relâche jamais l'affaire sans jamais en foutre partout. Pour comprendre que tout l'attirail de synthés joués par les deux guitaristes n'est pas si encombrant que les premières écoutes laissaient supposer et s'inscrit parfaitement dans les méandres de compositions bien plus ambitieuses que tout ce que Calva a pu enregistrer jusque là.
Il faut du temps pour digérer tout ça, pour ne pas s'effrayer des nombreux sons synthétiques, du vocoder et chant qui n'a jamais été aussi présent chez Calva. Un chant qui peut très bien le faire mais aussi faire serrer des sphincters quand il prend parfois des intonations à la Red Hot Chili Peppers comme sur Titan. Et comme si ça ne suffisait pas, deux invités viennent prêter leurs cordes vocales. La chanteuse de Choochooshoeshoot sur un Rosemary très classe et tout en tension rentrée ou sur le plus agité Robocop avec le chanteur de Kourgane. Chaque titre possède son caractère bien trempé, ça part dans tous les angles mais ça revient toujours au centre. Le mélange entre le rock, les synthés, les effets multiples, l'énergie continuelle trouve sa voie, taille dans le vif. La confrontation est parfois osée, déstabilisante mais se retrouve gagnante à la fin.
On en devisait après le concert avec Stéphane Sapanel, batteur de Calva et membre éminent du label A Tant Rêver Du Roi, Calva n'est pas le genre de groupe à se faire facilement épingler. Autant avec des groupes comme Adolina et Vélooo, vous savez rapidement où vous mettez les pieds, autant Calva laisse un goût étrange dans la bouche, un goût d'inconnu mais un goût de reviens-z'y. Perte & Fracas possédant le don de voyance, il était annoncé dans leur split avec Io Monade Stanca que Calva pouvait prendre tous les chemins qu'il voulait. C'est exactement ce que Calva a fait avec ce véritable premier album. Un groupe piochant un peu partout, ne s'épargnant rien et dont le premier EP est déjà très loin derrière eux. Un album qui prend le temps de se savourer, d'explorer chaque facette, de s'écouter en concert. Un album qui fait s'agiter le corps tout en s'adressant à la tête de la part d'un groupe surprenant, qui cherche, expérimente, qui ne cherche pas à aller là où on souhaiterait qu'il aille. C'est si rare par les temps qui court qu'il ne faudrait pas passer à coté de ce disque.

SKX (23/05/2012)