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Zëro
Hungry Dogs (In The Backyard) - LP
Ici D'Ailleurs 2011

J'avais prévu d'en faire des tonnes, de les descendre en flamme, de m'insurger contre toutes ces chroniques dithyrambiques bien trop respectueuses, à l'image de tous les Shellac, Nick Cave ou Jon Spencer pour qui tout le monde s'enflammait, à une époque, au moindre pet sonore. Rappeler sournoisement les propos d'un fan invétéré de tous les projets de la bande d'Eric Aldéa qui, lors d'un concert de Zëro, avait piteusement quitter le premier rang pour me glisser à l'oreille : on dirait du Pink Floyd.
Et puis je me suis fait une raison. J'ai écouté cette musique comme eux semblent la faire. En dilettante. Sans se prendre la tête. Alors certes, en ces temps de bilans, c'est loin d'être le disque de l'année - je serais d'ailleurs bien en peine d'en désigner un qui tienne véritablement la route -, c'est une musique qui ne me remue pas, me laisse relativement indifférent mais qui ne vaut pas qu'on s'emporte. Je comprends très bien ce que l'autre voulait dire avec son histoire de flamand rose. C'est une musique élégante, agréable, qui ne heurte pas, n'agresse personne, qui file à vide, une musique neutre.
Bref, toujours la même rengaine que sur leurs précédents enregistrements. En un peu plus pire. Le coup de la chronique qui se répète. Zëro infini, éternel recommencement. Manque ce bout de niaque, de tension ou de colère, appelez ça comme vous voulez mais le truc tapi au fond du ventre qui donne envie d'y croire et d'y retourner, des musiciens toujours racés mais qui n'auraient pas abandonné les crocs, cette touche sombre et nerveuse que l'on entend sur Speedball ou le bizarre et plus captivant Polly's on the run. Trop rares moments. Zëro, groupe sans cesse créatif, à la musicalité affirmée, compos rondement menées mais qui ne me touchent pas. Lisses derrière tout le monstrueux savoir-faire de Zëro. Et puis un disque où on entend plus les synthés que les guitares n'est jamais bon signe. Parce que des morceaux pénibles ou des passages agaçants, et ça c'est nouveau, il y en a quelques uns et Clown in a crowd détient le pompon (côtoyer Marvin n'a pas que du bon). Sans oublier les fins de morceaux de First turns to last ou Queen of pain, voir un Cracker's ballroom presque trop facile pour du Zëro.
Mais on va s'arrêter là, on a dit qu'on allait pas trop en faire, on va mettre son mouchoir sur sa peine et laisser couler un jeu entre amis qui ont l'air de bien s'amuser, un disque beau et peinard, tranquillement inoffensif avec un Zëro qui n'est plus le signe de l'infini mais le début de la fin.

SKX (19/12/2011)