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Drive With A Dead Girl
Fives - CD
Et Pourtant Ça Avait Bien Commencé 2011

Est-ce parce que Drive With a Dead Girl était le nom d'un épisode de Twin Peaks que la musique de ce groupe de Lille est difficilement appréhendable, qu'elle baigne dans une aura mystérieuse ? Qu'elle brouille les pistes et ne s'épargne pas des longueurs nuisant à la clarté de la narration ?
Aussi irritant qu'attirant, aussi bancal que pénétrant, Fives avance ainsi, chancelant, fort de ces faiblesses, enveloppant chaque morceau d'une ambiance différente, d'un halo incertain où tout semble pouvoir se casser la gueule d'une seconde à l'autre. Ainsi, Drive With a Dead Girl enchaîne des plans faiblards, propulsés par un rythme rachitique et finit sur une attaque noisy digne d'un Sonic Youth maladif. Joue à la limite du faux sur des lignes de guitares d'équilibristes et alterne ces dissonances avec une froideur typiquement new-waveuse (I will be walking). Crispe les nerfs avec des morceaux qui ne semblent pas en place avant que le même morceau ne décolle et finit par vous convaincre. Ca sent plusieurs fois l'amateurisme mais aussi le mordant de jeunes gens sans préjugés et qui foncent dans le tas. Une production faiblarde (à ce niveau là, on ne peut d'ailleurs pas parler de production), un manque d'ampleur, des moyens sans doute dérisoires, des guitares qui tentent d'aller dans le rouge, mode Lee Ranaldo mais qui ne feront finalement pas saigner beaucoup de tympans tant le manque de puissance est flagrant. Mais de ces manques, ils en tirent, bien involontairement sans doute, une approche singulière, une fragilité sur le fil du rasoir, des climats bizarres qui finissent par vous intriguer. Et parmi ces incongruités, le chant féminin en est une belle. Sûrement le point fort du groupe, là encore loin de la perfection, qui en fait parfois trop aussi mais qui a le mérite de captiver, de montrer ses failles. Et quand il part dans une langue inconnue ressemblant à du russe, notre Laura Palmer du nord devient encore plus séduisante et étrange.
Une heure de ce régime, c'est beaucoup trop, surtout quand ils finissent avec un ambitieux Vautours de douze minutes se prenant les pieds dans le tapis. On n'a pas tout compris au film, on a souffert avec eux, on a subi mais Drive With A Dead Girl a définitivement quelquechose d'attirant, des images à extraire et une bande-son déconcertante.
Ils n'en sont pas à leur premier coup d'essai. D'autres albums en forme de CDrs sont gratuitement disponibles, comme Fives, sur leur site, et ce… cinquième album en cinq ans les fait sortir de leur tanière. Ce n'est pas le moment d'abandonner la conduite, même avec une fille morte à ses cotés.

SKX (23/05/2011)