Todd
Big Ripper - LP
Riot Season 2009

On les avait cru morts, ensevelis sous le propre poids de leurs saturations, bouffés de l'intérieur par les outrageuses stridences de leurs larsens. Mais Todd est là, toujours là et plus que jamais. Il faudrait être sourd pour ne pas s'en rendre compte. Ils ont réussi à faire pire que leur second album Comes To Your House. Comprenez par là que c'est encore plus bruyant, plus sauvage, plus punk. Comprenez par là, encore plus jouissif. A mort. Trois ans de hiatus n'ont en rien altéré leur soif d'en découdre avec la terre entière, de leur en foutre plein les tympans à ces salauds d'humains. Un son pour lequel on manque de qualificatif. Part Chimp doit en être vert de jalousie. C'est viscéralement noise, épais, tumultueux, une puissance anarchique à faire trembler n'importe quelle fondation d'un mec comme ma pomme qui en a pourtant écouté des vertes et des pas mûres dans le style après moi le déluge. Chaque instrument, chaque coup de cymbale, chaque corde de basse, le moindre effleurement des cordes de la guitare font tout vibrer de partout, se répand, se contorsionne, crache le feu, sature à mort, totalement irrespectueux des règles élémentaires de l'acoustique.
De la formation du précédent album, il ne reste plus que la tête pensante Craig House. Il est en passe de devenir l'ennemi public numéro 1 des bienséants, menant sa nouvelle troupe vers un mur de distorsions rarement atteint. Les huit premiers morceaux de l'album, du Track Side Fire au Arista Disco, sont tous torchés en moins de trois minutes. Une méchante salve qui nique tous les apprentis Converge, qui nique d'ailleurs à peu près tout le monde, sans se soucier des codes en vigueur, sans le moindre besoin de vous caresser dans le sens du poil. Todd change de personnel mais la philosophie reste identique. C'est avec les six minutes de The (R)Wub et les quatre titres suivants que Todd entame sa seconde partie d'album. Ce n'est pas forcément une bonne nouvelle pour votre ouïe fine de savoir que leur belle musique va déborder dans des minutes encore plus longues et tortueuses mais leur noise se teinte d'un brin de psychédélisme latent et pervers, d'un rythme qui devient plus lourd que rapide (toutes proportions gardées) même si Walnut and Leather vous remet vite fait dans le droit chemin d'un bruit pur. C'est surtout avec la paire de morceaux French and in France et French and out of France que Todd explore des territoires différents, punissant notre beau pays d'ambiances tour à tour relâchées puis bruitistes de fin du monde, soit en tout quatorze minutes (dont deux de pure silence, chez Todd c'est rare, il faut savoir en profiter) où même ces maudits rosbifs éprouvent le besoin de souffler. Ne vous fiez pas au dessin naïf de la pochette. Ce gentil bûcheron débite du noise par paquet de douze, se transformant en un dangereux massacreur à la tronçonneuse, oeuvrant pour la déforestation du rock, bottant le cul à toutes les conventions et reprenant à son compte les bonnes paroles de Chuck Norris : je mets les pieds où je veux et c'est souvent dans la gueule.

SKX (19/11/2009)