Agathe Max
This Silver String – CD
Xeric/Table Of The Elements 2008

Pour la parution d’un premier album studio, il y a pire comme label que Xeric (sous-marin du très arty Table Of The Elements). On ne va pas refaire la liste de tous les noms qui figurent au catalogue de cette illustre maison mais cela en impose. Cela vous colle une image et il faut bien faire avec. En éditant de beaux objets, en choisissant l’option vinyle et/ou le tirage limité, Table Of The Elements est au snob élitiste ce qu’ Hydra Head ou Southern Lord est au hipster bourrin et tatoué : un sujet inépuisable de fierté, un catalyseur de bon goût supposé, un phare éclairant l’horizon au dessus de la mêlée des suiveurs et des imitateurs. Si sortir un disque sur un tel label c’est bénéficier d’un sérieux coup de pouce, c’est aussi prendre la risque de se voir comparé, jaugé, évalué par rapport à des critères qui n’ont pas lieu d’être -c’est tout le problème de la hype.
Heureusement pour elle, Agathe Max a un immense talent. Et avec son violon et ses quelques pédales d’effet elle joue dans la cour habituelle de Table Of The Elements, souffrant parfaitement si besoin est la comparaison avec ses collègues de label. Mais c’est inutile. Avec This Silver String elle démontre qu’elle ne doit rien à personne. Ce disque est là, magnifique, profond et magique (mais jamais vénéneux) et il en impose uniquement par lui-même. Si Agathe Max devient la prochaine grande prêtresse des nerds à lunettes -oui je délire- ce sera tant mieux même si elle vaut bien mieux que ça.
Le premier titre (This Silver String) est d’une limpidité foudroyante. Frederic est tout aussi beau. Ashes Of Broken Furnitures a un côté folklorique et une légère rythmique. Raw Bow joue sur les dissonances. Black Needle est le joyau ésotérique du disque. Cinq titres d’une musique dont la superficie dépasse de loin les moyens employés -un violon et un archet-, une étendue toute en creux et en bosses, des aspérités mouvantes, des changements subtils dans le paysage, un lac dont on ne voit pas la rive opposée et balayé par un vent fort et pénétrant. Un disque d’accompagnement intime qui vous prend par l’intérieur et ne vous lâche pas. Tellement vecteur d’émotions et de frissons épidermiques que l’on est à mille lieu de toute musique d’intellos.

Haz (01/11/2008)